

Lorsqu'Harry se réveilla au beau milieu de la nuit, Rose dormait à poings fermés. Elle était complètement collée contre lui, ses petits bras entourant son torse nu et ses jambes entrelacées avec les siennes. Il pouvait sentir son front perler de sueur et il avait la réelle impression d'être en train de suffoquer, privé d'air et de fraîcheur. Pourtant il ne bougea pas d'un poil. Il se contenta de refermer ses paupières et de resserrer sa propre emprise sur la jeune fille. Elle était venue, elle était là, ils étaient tous les deux dans le lit qu'il leur avait choisi, il était absolument hors de question qu'il se dégage de son étreinte, même pour aller respirer trois minutes à la fenêtre. Il y avait un risque qu'elle se réveille et qu'elle croie qu'il recommençait, comme un mois auparavant. Qu'il la laissait de nouveau livrée à elle-même dans un grand lit comme celui-ci, pour partir à l'autre bout du monde. C'était hors de question. Il ne la quitterait plus. Jamais de son plein gré, en tout cas.
Il lui fallut un bout de temps pour retrouver le sommeil. Parce qu'il avait enclenché la zone réflexion de son cerveau et qu'à partir du moment où il avait commencé à se demander quelle décision Rose allait bien pouvoir prendre dans la journée par rapport à eux deux, il avait été pleinement réveillé. Il avait pensé à toutes les possibilités, et il n'y en avait qu'une qui lui plaisait : la plus improbable. Celle où elle déciderait de tout oublier sur le champ et où la situation dans laquelle ils étaient à cet instant, à quatre heures du matin, aussi proches qu'ils n'aient jamais pu être, était normale, presque routinière. C'était une utopie, bien évidemment. Mais elle lui avait permis de se rendormir, au moins. Jusqu'à ce que Rose fasse un geste brusque qui le réveilla en sursaut. Elle venait littéralement de lui écrabouiller le genou en bougeant mais il se retint de grogner pour ne pas la déranger dans son sommeil à elle, qui semblait profond. Il plia ses jambes, désormais libre de tout mouvement puisqu'elle s'était détachée de lui, et massa son articulation en grimaçant, alors que la jeune fille se tournait et se retournait sans sembler pouvoir s'arrêter. Rose n'avait pourtant pas un sommeil très agité. Ils avaient déjà dû dormir ensemble près d'une centaine de fois et pourtant, elle ne l'avait jamais dérangé. Son comportement était inhabituel et vu l'expression de son visage, ce n'était pas une partie de plaisir qu'elle était en train de vivre. Harry se tourna vers elle, une ride d'inquiétude sur son front. Elle n'allait pas bien, et il détestait la voir dans un tel état, pourtant il hésitait à la réveiller. Si ça se trouve, ce n'était qu'une mauvaise passe dans un de ses rêves et elle allait se recoller contre lui d'ici quelques minutes. Mais les minutes passaient et elle restait aussi agitée, aussi habitée par l'effroi et le choc. Alors quand elle gémit un « Cal », sur un ton à la fois alerte et suppliant qui mit Harry sans dessus dessous, il ne se retint pas plus. Il s'assit sur le matelas et attrapa le visage de Rose entre ses mains, pour essayer de la réveiller le plus gentiment possible. Ses joues étaient bouillantes et des larmes commençaient à perler au coin de ses yeux. Elle était en train de vivre un cauchemar et Harry refusait qu'elle subisse ça plus longtemps.
HARRY_ Rose, souffla-t-il une première fois, doucement, pour ne pas la brusquer. Bébé réveille-toi, ce n'est qu'un cauchemar, tout va bien, continua le bouclé en caressant ses pommettes du dos de ses doigts pour la faire réagir. Rose, ne m'oblige pas à te hurler dessus. ... Bébé.
ROSE_ Non, s'il te plaît, non, Cal, non, sanglota Rose en se dégageant des mains d'Harry.
HARRY_ ROSE REVEILLE-TOI !, hurla Harry en la secouant doucement au niveau des épaules, à présent paniqué.
Après trois secousses de plus en plus violentes, Rose finit par ouvrir les yeux en catastrophe. Elle tremblait à vue d'oeil et Harry ne la quittait pas des yeux, complètement paralysé d'avoir été témoin d'une chose pareille. Il n'était même pas capable de dire quelque chose pour la rassurer, perdu depuis qu'elle avait à plusieurs reprises mentionné Cal. Pourquoi était-elle en train de supplier son ami photographe – ou bien était-ce Calum ? - et que s'était-il passé pour qu'elle se retrouve avec lui ? Puis Rose bougea. Elle se jeta hors du lit pour attraper son sac et le vida pour y trouver son téléphone, qu'elle manipula aussi bien qu'elle le pouvait pour vérifier son journal des appels, visiblement. Le dernier était de sa maman, la veille au matin. Rien ne provenait de Cal. Elle remonta sur le matelas et entoura ses genoux de ses bras, ne croisant toujours pas le regard d'Harry. Il se demandait même si elle savait qu'il était là. Elle semblait embarquée sur une autre planète, coincée entre deux mondes, et l'idée que ce genre de choses ait pu se produire auparavant quand il n'était pas avec elle le terrorisait.
HARRY_ Bébé, ça va ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?, tenta-t-il dans un souffle en portant une de ses mains sur les siennes.
Rose ne bougea que ses doigts pour les entremêler aux siens, serrant sa main dans la sienne aussi fort qu'elle le pouvait. Elle pouvait bien être en train de lui broyer les os, mais il ne releva pas, trop inquiet de savoir si elle allait aller mieux. L'atmosphère dans la pièce était extrêmement étrange et Harry n'était pas certain de l'aimer. Sa température corporelle avait largement chuté en voyant sa copine aussi mortifiée et il attendait, la poitrine en feu, de l'entendre parler, prononcer un mot. Elle était aussi choquée que lorsqu'elle avait appris que sa meilleure amie allait peut-être la quitter, et ça n'avait rien de rassurant.
HARRY_ Est-ce que tu veux en parler ma puce ?, susurra le bouclé en dégageant son visage des mèches de cheveux qui s'y étaient collées. Quoi que ça ait été, ce n'était qu'un mauvais rêve, d'accord ? Tu es réveillée et tout va bien.
Rose ne pipa toujours pas mot. Elle serra la main d'Harry encore plus fort entre les siennes comme seule réponse, mais c'est tout ce qu'il obtint d'elle, alors qu'elle explosait en sanglots encore un peu plus fort. Elle se battait pour reprendre son souffle alors que sa fatigue évidente se faisait ressentir au travers de ses bâillements incessants. Le silence était complet dans la pièce, tout ce qu'ils pouvaient entendre étaient les hoquets de la jeune fille et la respiration lente et posée du bouclé. Il essayait de garder son calme pour lui paraître rassurant, mais il n'en menait pas large non plus. Il avait peur de faire un geste trop brusque, de dire quelque chose qui ferait écho avec les horreurs qu'elle venait de vivre.
HARRY_ Il faut que tu mettes quelque chose sur toi, tu es frigorifiée Rose, soupira Harry en tirant sur la couette avec sa main libre pour l'entourer autour d'elle.
Il bougea doucement pour aller lui chercher un vêtement à mettre sur son corps resté entièrement nu, mais Rose tira sur son bras et finit par se jeter à son cou, s'asseyant sur ses cuisses, toujours sans un mot. Harry retint un hoquet de surprise et plaça une de ses mains dans ses cheveux, et l'autre dans le bas de son dos. Il était complètement déstabilisé de se retrouver avec une version muette de sa copine, elle qui passait pourtant son temps à papoter. Elle tremblait de tout son long et semblait incapable de reprendre sa respiration au milieu de ses sanglots. Harry avait soudainement l'impression d'avoir Lux dans ses bras plutôt que Rose ; Lux en plein chagrin, trop petite pour s'exprimer au milieu de ses larmes.
HARRY_ Je vais m'allonger Rose, d'accord ?, proposa-t-il d'une voix douce. Je vais m'allonger, et on va se rendormir ensemble, je ne te lâcherai pas c'est promis, et tu vas oublier ce qu'il s'est passé, et tu vas simplement dormir, sans rêve, sans cauchemar. Juste dormir. ... Je m'allonge, d'accord ?, la prévint-il en s'affaissant doucement sur le matelas, l'emportant avec lui. Voilà. Tu peux te rendormir ma puce. Tout va bien. Je suis là. ... On est en sécurité.
Rose resserra son étreinte autour de lui, laissant sous-entendre à Harry qu'il avait visé juste avec les paroles qu'il avait prononcées. Il resta immobile un long moment, à simplement caresser le dos de sa copine du bout de son pouce en espérant l'apaiser. Il finit par sentir son souffle régulier s'abattre contre sa peau et se félicita d'avoir réussi l'exploit de la voir se rendormir, parce que ce n'était pas gagné d'avance. Lorsqu'il tourna la tête pour jeter un coup d'oeil à son téléphone posé sur sa table de nuit, l'écran indiquait six heures. Et il était pleinement réveillé. Ce n'était plus la décision que Rose prendrait plus tard qui le gardait éveillé maintenant, mais plutôt le fait d'essayer de deviner ce qui avait pu la retourner autant. Allait-elle au moins lui dire ? Y avait-il eu des prédécesseurs ou était-ce la première fois ? Questions sans réponses.
C'est un frisson dû à une brise glaciale qui réveilla Harry une poignée d'heures plus tard. Il grogna longuement tout en se retournant sur le ventre pour enfouir son visage dans son oreiller avant d'ouvrir lentement ses yeux et de les laisser s'habituer à la lumière du jour. Il étendit son bras sur le côté en espérant pouvoir attraper le corps de Rose mais sentit son c½ur faire une chute libre quand il réalisa que le lit était vide. Pendant une fraction de secondes, il se demanda si ce n'était pas lui qui avait rêvé. Si elle n'était pas jamais venue, s'il n'avait pas tout imaginé cette nuit, dans son sommeil. Mais un petit bruit d'articulation qui craque suivit d'un « Aoutch » lui fit relever la tête et un sourire endormi s'étala sur ses lèvres. Non, elle était bien là. Accoudée à la fenêtre, engoncée dans le pull bleu qu'il portait la veille, les cheveux relevés en un chignon imparfait comme elle avait l'habitude de le faire tous les matins, elle observait tranquillement le paysage qui s'offrait à elle, jusqu'à ce que la voix de son amoureux parvienne à ses oreilles, la faisant se retourner.
HARRY_ Le jardin te plaît Babe ?
ROSE_ Il est magnifique chaton. Il manque un peu de couleurs pour le moment mais vu le temps qu'il fait c'est normal. Ca va être superbe au Printemps. Dommage que je ne sois pas là pour en profiter, ajouta-t-elle avec un petit sourire triste en quittant le regard d'Harry.
HARRY_ Ca va mieux ou pas ? Tu m'as foutu la trouille Rose, tu étais vraiment mal, grimaça Harry se fouinant plus profondément sous la couette.
ROSE_ Je suis encore traumatisée, mais j'ai réussi à ne pas retomber dedans en me rendormant, heureusement.
HARRY_ Pourquoi est-ce que tu parlais de-
ROSE_ Plus tard Curly, souffla Rose en secouant la tête de droite à gauche. Je ne préfère pas y repenser maintenant. ... Au fait, tu pourras dire à Liam que c'est un très bon acolyte. Et un très bon menteur, sourit-elle en coin en s'avançant pour s'asseoir au bord du lit, suffisamment proche de lui pour pouvoir glisser ses doigts sur son visage et dans ses boucles.
HARRY_ Comment ça ?
ROSE_ Il m'a fait croire que Juliette avait mes fringues. Mais elles sont là, dans le placard, à côté des tiennes. Il les a rangées ici pendant que tu n'étais pas là, pas vrai ?
HARRY_ C'était le seul que je pouvais déranger, rit-il doucement. Il est confortable mon pull ma chérie ? J'étais persuadé que tu étais arrivée avec le tien hier ..., la taquina le bouclé en faisant courir ses doigts sous les manches bien trop larges.
ROSE_ Il est mieux que le mien, parce que-
HARRY_ Je sais, parce qu'il est BLEU.
ROSE_ Arrête avec le bleu, abruti, gloussa Rose en s'allongeant à plat ventre pour que leurs visages ne soient qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. Non, il est mieux parce qu'il sent toi.
HARRY_ Oh. Alors dans ce cas, tu vas devoir me filer le tien. Et revenir pour me faire un câlin, affirma Harry avec un regard malicieux.
Rose secoua la tête de droite à gauche en riant doucement devant la mine endormie de son copain. C'était comme ça qu'elle le trouvait le plus mignon, le plus craquant. Quand il était tout juste réveillé, que sa voix était encore rouillée par le sommeil, que son sourire illuminait son visage encore tiré et que ses yeux peinaient à rester ouverts. Il ressemblait à un enfant et c'était tout ce qu'il y avait de plus adorable. Elle déposa ses lèvres un peu partout sur son visage tout en le chatouillant du bout de son nez avant de se lever pour retrouver son pull vert, enfoui sous le reste des vêtements qu'ils portaient la veille. Autant dire qu'ils n'avaient pas vraiment pris le temps de plier et de ranger leurs affaires dans l'euphorie du moment. Envahie par les souvenirs, Rose ne réalisa même pas qu'elle se mordillait la lèvre quand elle tendit le tricot à son copain, qui ne se dérangea pas pour lui faire prendre des couleurs en lui soufflant un « Mais tu peux aussi retirer ce que tu portes si je te manque comme ça. » qui lui valu un coup d'oreiller sur la figure. Harry grogna de mécontentement au milieu d'un rire - un de ces rires du matin avec une voix épaisse et brumeuse où il gigotait parce que c'était le seul moyen de le faire sortir – et se releva légèrement pour enfiler le pull, avant de tirer le poignet de Rose pour qu'elle retombe sur le matelas avec lui. Elle s'écrasa sur son torse désormais couvert et leurs deux rires s'évanouirent lentement. Ils restèrent là un long moment, leurs regards noyés l'un dans l'autre, à parler de tout et de rien comme ils aimaient tant le faire, en contournant toujours de manière très habile tout ce qui avait pu se passer entre le 1er de l'an et la veille. Ils savaient aussi bien l'un que l'autre qu'à un moment il faudrait affronter cette conversation qu'ils redoutaient tous les deux, ils n'étaient pas dupes. Mais pour l'instant, ils ne voulaient pas y penser. Rose était en train d'expliquer à Harry en quoi consistaient les examens finaux qu'elle aurait à passer mi-mai et c'était bien plus intéressant. Il essayait de la rassurer en lui affirmant qu'elle était brillante mais elle ne faisait que mentionner ses dernières notes dont elle était foncièrement déçue. « C'est de ma faute Babe » serait bien sorti de la bouche du bouclé mais il ne voulait pas déraper aussi vite. Il voulait encore profiter de sa proximité, sentir les dernières effluves de son parfum qui avaient survécu à la nuit et au tour du cadran, se noyer dans l'océan que représentaient ses yeux, l'aimer de tout son c½ur en sachant qu'elle était sienne. Ils n'étaient que tous les deux, rien que tous les deux, loin de tout et de tout le monde, dans leur bulle, dans leur monde, et pour rien au monde il ne voulait changer ça. Pourtant alors qu'il terminait de lui expliquer en quoi allaient consister ses prochains mois avec le groupe, Harry entendit le clocher de l'église avoisinante sonner 11h et son ventre gronder. Rose avait cours le lendemain, il allait falloir qu'elle soit chez elle à une heure raisonnable pour pouvoir avoir une bonne nuit de sommeil et il ne pouvait décemment pas la laisser repartir tant que rien n'était à plat. Alors il soupira doucement et porta une de ses mains à son visage pour caresser sa pommette du bout de son pouce, avec un poids énorme sur la poitrine.
HARRY_ J'aimerais tellement qu'un instant pareil puisse durer éternellement Rose. Faire semblant qu'il n'y a plus que ça de vrai, nous deux, l'amour qu'on sait qu'on peut se porter, que rien ne puisse déraper, que tout soit aussi parfait que maintenant.
ROSE_ Je sais ..., déglutit Rose difficilement en baissant le regard. Si seulement.
HARRY_ Je viens de tout ruiner, pas vrai ?, grimaça le bouclé en plaçant son index sous son menton pour récupérer son regard.
ROSE_ Non, tu as bien fait de me ramener sur Terre, j'étais partie un peu loin. Ca sert à rien que je me voile la face.
HARRY_ Tu me fais peur Rose.
ROSE_ Moi aussi j'ai peur Curly, avoua-t-elle dans un souffle avant de poser sa tête sur la poitrine du brun pour écouter son c½ur, une dernière fois. Ton estomac gronde chaton, tu dois être affamé, tu n'as rien avalé depuis hier midi.
HARRY_ Toi non plus ma puce, je te ferais dire.
ROSE_ Je n'ai pas besoin de manger quand je suis avec toi, tu me suffis.
HARRY_ Rose ? Tu réalises que ce que tu viens de dire était extrêmement bizarre, pas vrai ?, pouffa Harry.
ROSE_ Comment ç- Oh mon Dieu, Harry, non, tu peux pas être sérieux ?, protesta la jeune fille en se relevant instantanément, cramoisie.
HARRY_ Mais quoiiiii ?!
ROSE_ Je dis un truc tout mignon supposé être super romantique et tu le tournes en un truc complètement pervers, t'abuses clairement !
HARRY_ C'est de ta faute, tu dis des choses ambiguës Babe. ... Mais je reconnais que je n'ai pas eu faim une seule seconde non plus. Ton rouge à lèvres m'a suffi, sourit-il fièrement.
ROSE_ Je me doute, tu en as absolument partout, c'est adorable, rit-elle avec un clin d'oeil. Tu as quelque chose à manger ici au moins ?, demanda Rose en descendant du lit.
HARRY_ Tu me sous-estimes ma chérie, tu le sais ça ? J'ai de quoi faire un repas de chef dans mon frigo.
ROSE_ Parfait, je te laisse faire pendant que je file prendre ma douche alors ?
HARRY_ Te laisser tester la douche toute seule pendant que je bosse ? Non mais ça va oui ? On y va à deux, ça ira bien plus vite, tu verras, affirma Harry avec un sourire en coin en attrapant un tee-shirt, un jean et un boxer propre dans l'armoire.
Rose haussa les sourcils en récupérant son jean de la veille, un top dans ceux qui étaient pliés dans ses affaires et ses sous-vêtements propres qu'elle avait prévus. Elle n'allait pas dire que prendre une douche avec Harry lui déplaisait, ce serait mentir, mais dire que ça irait plus vite était un énorme mensonge. Evidemment que non, ça n'allait pas aller plus vite. Ils allaient simplement pouvoir profiter l'un de l'autre un peu plus longtemps en faisant semblant que c'était normal et obligatoire, puisqu'il fallait bien qu'ils se douchent. Ils étaient plutôt doués pour se voiler la face, aujourd'hui.
Un bain à remous, quelques baisers fiévreux, une bataille de mousse et une séance de massages plus tard, Harry faisait enfin visiter rapidement la maison à Rose avant de l'embarquer dans la cuisine pour qu'ils puissent déjeuner. Enfin, faire un brunch serait plus exact vu l'heure tardive qu'il était déjà. Comme ils l'avaient sincèrement dit plus tôt, la faim ne les dérangeait même pas quand ils étaient tous les deux, mais quand l'odeur du bacon et des ½ufs brouillés commença à titiller leurs narines, autant dire que leurs estomacs grondaient. Le bouclé indiqua le placard des assiettes et des verres à Rose et un petit sourire prit place sur ses lèvres quand elle s'aperçut qu'il avait fait installer les meubles à la hauteur la plus adéquate pour elle. Il avait pensé à tout pour eux deux, jusqu'à la grosse paire de ciseaux de cuisine pour gauchers qui était glissée à côté des autres dans le tiroir. Il n'avait pas fait les choses à moitié, et ça donnait à la jeune fille l'envie de pleurer de joie et de chagrin à la fois, compte tenu de ce qui était supposé se passer après. Rose décida d'ignorer le pessimisme qui se diffusait dans ses veines et s'occupa des tranches de pain de mie dans le grille-pain, tout en narguant Harry à coups de « Ca ne vaut pas nos bonnes baguettes et traditions françaises chaton ». Il fut obligé d'acquiescer mais obtint d'elle que le thé était bien mieux ici. Puis ils déjeunèrent tranquillement, en tête à tête autour de la table en verre qui ornait la salle à manger. Derrière Rose, l'écran plat et le petit coin télé, avec une table basse, des canapés et des fauteuils et des colonnes de DVD et CD en tous genres. Derrière Harry, un grand panneau de mur sur lequel était accrochée une grande toile qui représentait Paris de nuit, les quais et Notre-Dame, le quartier préféré de Rose. Rien n'avait été laissé au hasard dans cette maison, et Rose s'y sentait déjà chez elle, malheureusement. Elle laissa le jeune homme lui expliquer que la maison en elle même était déjà terminée depuis un petit moment mais qu'il la voulait absolument parfaite avant de lui montrer, et que Liam avait adorablement accepté de s'occuper des fignolages la semaine passée. Il avait fait de nombreux aller-retour entre son appartement et cette maison, sans jamais broncher, parce qu'il savait à quel point c'était important pour Harry. Rose eut du mal à terminer son assiette. Non pas qu'elle ait trop mangé, non, mais une boule commençait déjà à prendre place dans son ventre et sa gorge était nouée ; plus rien ne passait. Elle sentait le moment arriver et elle ne savait pas réellement comment aborder les choses. C'est une poignée de minutes plus tard, quand ils étaient en train de débarrasser la table ensemble et qu'Harry rinçait leurs assiettes avant de les placer dans le lave-vaisselle que les mots s'échappèrent littéralement de sa bouche, comme le verre échappa des mains du bouclé quelques secondes plus tard, sous l'effet du choc.
ROSE_ Est-ce que tu as déjà pensé à avoir une relation libre ?
HARRY_ Excuse-moi ?, finit-il par articuler alors que son c½ur menaçait d'imploser et que ses bras peinaient à soutenir son poids au-dessus de l'évier.
ROSE_ Je crois que tu as bien compris, Harry, souffla Rose doucement, avec une voix qu'elle voulait solide et sûre d'elle.
HARRY_ Non justement, j'ai peur de mal comprendre Rose. Tu me demandes si je veux d'une relation libre avec toi ? Tu es sérieusement en train de me poser une question aussi stupide ?!
ROSE_ Pense-y deux secondes, ce n'est pas si stupide que ça, je t'assure. Tu pourrais-
HARRY_ Tu vois quelqu'un d'autre ? C'est ça Rose, tu as rencontré quelqu'un et tu sais pas comment me le dire alors tu essaies de trouver une solution à la con ?, gronda Harry en se tournant à présent vers elle pour lui faire face. Evidemment que c'est ça, ce que je peux être bête, fit-il en plaquant sa paume sur son front. Et bah tu sais quoi-
ROSE_ JE VOIS PERSONNE HARRY PUTAIN, hurla la jeune fille pour le calmer immédiatement, effrayée par la façon dont il la surplombait avec sa vingtaine de centimètres en plus. Je suis pas sortie de chez moi pendant un mois, tu voudrais que j'aie rencontré qui ?
HARRY_ Peut-être que t'as rappelé Matthieu. Parce que lui il te faisait pas du mal et qu'il prenait soin de toi.
ROSE_ Qui est-ce qui t'a mis une idée pareille en tête ? C'est Louis, hein ? L'écoute pas quand il te dit des trucs comme ça, s'il te plaît. Il essaie de te faire réagir, mais je refuse qu'il se permette de ramener Matthieu sur le tapis comme ça. Ce que je viens de te proposer n'a absolument AUCUN rapport avec mon ex. C'est clair ?
HARRY_ Alors pourquoi tu me proposes quelque chose comme ça Rose ? J'ai déjà du mal à te voir dans les bras de mes meilleurs amis, tu crois que je vais accepter de te partager avec un autre garçon ?!, hallucina Harry. Tu crois que je vais respirer correctement en sachant que quelqu'un d'autre pose ses yeux sur toi, que quelqu'un d'autre pose ses mains sur ton corps, ses lèvres sur les tiennes ?
ROSE_ Oh mon Dieu, mais tu t'entends ? Tu sais très bien le nombre de garçons que j'ai eu dans ma vie, tu crois que c'est pour aller faire la pute que je te propose ça ? J'ai du respect pour ma personne, merci, répliqua Rose, outrée. Tu me partageras avec personne Harry, c'est moi qui vais devoir te partager.
HARRY_ Me partager avec qui ? Je t'ai promis de poser mes yeux sur personne d'autre-
ROSE_ Justement. Je veux pas être celle qui va t'empêcher de vivre ta jeunesse et de profiter de ta célébrité. T'es beau Harry, mon Dieu que t'es beau. Tu as des centaines de filles autour de toi où que tu ailles et je ne veux pas que tu t'empêches d'en profiter à cause de moi. Une relation libre te permettrait de t'amuser sans que je t'en veuille, de boire comme t'en as envie sans en redouter les conséquences.
HARRY_ Si tu essaies de me faire croire que ça ne te briserait pas le c½ur de me savoir en train de coucher avec une autre fille, à d'autres, Rose, s'exaspéra le bouclé. Tu ferais mieux de t'arrêter là et de nous laisser prendre une décision plus adulte. Et puis déjà, pourquoi est-ce que tu reviens sur Paige ? Je croyais que c'était réglé tout ça ? Pourquoi est-ce que tu ramènes un autre problème quand on en a déjà un très gros à régler ? Je comprends rien, Rose.
ROSE_ Arrête de me dire ça, s'il te plaît, essaie de me comprendre. Si le terme relation libre ne te plaît pas, appelle ça comme tu veux. Mais dans tous les cas, tu veux que je disparaisse des médias, alors on est obligés de s'éloigner.
HARRY_ J'ai bien compris que c'était impossible, j'abandonne, c'est bon. J'ai fait ce que j'ai pu, ça n'a pas marché, bon. On va ignorer et ce sera parfait, tant que tu es avec moi.
ROSE_ Tu n'abandonnes pas, Harry. Parce que je sais que tu ne feras que penser à ça et je ne veux pas. Donc tu continues. Je vais me faire minuscule, on ne se verra que lorsqu'on aura pas le choix parce que c'était prévu depuis un moment et je fais semblant d'avoir disparu, comme le fait Eleanor.
HARRY_ Tu les laisses gagner, ça y est ?, soupira Harry, rouge de colère. Je fais quoi sans toi, moi ? Rien. Je fais rien. La distance nous détruit déjà suffisamment, on se voit à peine bébé, je ne peux pas te voir encore moins, c'est du n'importe quoi. Et puis ça ne changera rien, on va se faire du mal pour rien !
ROSE_ J'ai jamais dit que ce serait facile mais c'est la seule solution que j'ai trouvée. Tu vas me manquer plus que permis et je risque de regretter rapidement mais en même temps, tu t'es royalement foutu de ma gueule pour tenter quelque chose, alors je voudrais que tu y voies un résultat. Je décide de ne pas mettre fin à notre histoire parce que je t'aime et que malgré toute la volonté que j'y mets, je n'arrive pas à t'en vouloir éternellement. Tout ce qui revient ce sont tes lèvres, tes bras musclés et chauds, et toi, juste toi. Je veux pas abandonner après les efforts qu'on a mis en un an pour construire un cocon agréable et sécurisé. Je veux simplement nous donner du temps de réaliser ce qu'on représente l'un pour l'autre, expliqua Rose, au bord des larmes. Si on ne se voit que très rarement et qu'on ne communique pas tant que ça, peut-être que tu finiras par te chasser les fans de la tête, peut-être que j'arrêterai de me soucier de ces fois où tu me fais du mal, peut-être qu'on réalisera qu'on est inévitables et que tout le reste n'est pas supposé interférer. Que c'est nous deux face au reste du monde et qu'il n'y a que nous qui importons. Que l'important c'est qu'on sache que quoi qu'il se passe on s'aime plus que de raison et que ça ne sert à rien d'essayer de s'éloigner.
HARRY_ Mais Rose, on le sait déjà ça ! Pourquoi aller se mettre dans une situation à la con si on a déjà conscience de tout ça ?
ROSE_ J'en ai conscience Harry, mais je ne suis pas certaine que toi oui, avoua-t-elle d'une petite voix en baissant les yeux au sol.
HARRY_ Tu- Rose, c'est une blague ? Ça fait littéralement presque deux ans que ma vie ne tourne qu'autour de toi, que je n'attends que toi, que je ne veux que toi. Et ça fait un an exactement que je sais que la seule chose dont j'ai besoin c'est de t'avoir dans mes bras, à mes côtés, pour que tout le reste aille bien. Je viens de vivre le pire mois de ma vie à me demander si je t'avais perdue, crois-moi, je sais ce qu'on représente pour moi, se défendit le bouclé.
ROSE_ Alors pourquoi est-ce que tu avais besoin de t'occuper des autres ? Si on est les plus importants, pourquoi est-ce que tu as pris le risque de me voir partir en me mentant et en ramenant une autre fille dans l'équation ?
HARRY_ Parce que j'avais peur qu'elles te détruisent Rose. Et puis peut-être que j'ai voulu jouer au héros aussi, j'en sais rien. Je voulais te protéger parce que je refuse qu'on te fasse du mal quand tu es la personne à qui je tiens le plus au monde. C'était une connerie, j'ai compris, mais elle ne prouve en rien que je ne sais pas ce qu'on est. Pour l'amour de Dieu, Rose, si j'étais inconscient je te demanderais de m'épouser maintenant tellement je t'aime ! C'est ça que je vois quand je pense à nous. Tu es ma femme et on fonde une famille. Tu crois que j'aurais mis autant d'énergie dans cette maison autrement ?!
ROSE_ Moi aussi je vois ça, Harry. Mais justement, on est trop jeunes. On a 20 ans, ce serait de la folie que de se laisser croire qu'on peut faire un truc pareil à cet âge-là. C'est pour ça que je veux te redonner un peu de liberté. Moi je m'en fiche, tu me suffis largement, mais toi t'es un garçon, quand on se voit pas pendant deux mois, c'est évident que tu as des envies et je veux pas être celle qui te bloque, souffla Rose alors qu'une larme coulait désormais le long de sa joue.
HARRY_ Rose, écoute-moi s'il te plaît. Je ne veux pas d'une relation libre. Les seules envies que j'ai, elles sont pour toi, pour personne d'autre. Et je ne veux en aucun cas redevenir celui que j'étais avant toi, ce serait la pire chose qui puisse m'arriver. Tu m'as fait changer, toi, et il est hors de question que je reprenne ce que je faisais. Je n'ai besoin que de toi, Rose, crois-moi, insista Harry en éliminant les perles salées qui roulaient sur les pommettes de sa copine.
Rose baissa la garde, l'air vaincue. Le poids qui pesait sur ses épaules prit le dessus et elle relâcha tout, pleurant maintenant à chaudes larmes dans les bras d'Harry qui ne tarda pas à la rejoindre. Elle ne savait plus quoi faire. Elle avait réfléchi des heures et des heures et cette solution, aussi ignoble soit-elle, lui avait semblé la plus juste. Parce qu'ils pouvaient en faire ce qu'ils voulaient, la respecter ou s'en ficher totalement. Après tout, rien ne les obligeait à en profiter. Mais maintenant qu'elle avait lu le dégoût dans les pupilles du bouclé, elle n'était plus certaine d'aimer cette possibilité. Alors quoi, ils restaient comme ça, en stand-by, à jouer les amants parce qu'ils ne savaient plus vraiment ce qu'ils étaient après tout ce qui s'était passé ? Ils ignoraient tout le mal qu'ils s'étaient fait et reprenaient leur histoire là où ils l'avaient laissée le soir du réveillon ? Non. Rose n'était pas prête à ça, et Harry était conscient que ce serait injuste. Malgré la douleur que ça pouvait lui procurer, il savait qu'il devrait payer pour les conneries qu'il avait faites. Il avait voulu protéger Rose des attaques extérieures mais il n'avait fait que la blesser lui-même, et c'était la pire chose possible. Il allait payer pour ça, mais comment ? Pourquoi était-ce si compliqué de trouver un accord, de trouver quelque chose qui les satisfairait tous les deux ? Parce qu'ils s'aimaient comme personne et qu'il était inutile d'essayer de les séparer. Pourtant, c'était ça ou le pétage de câbles dans quelques semaines. Ils étaient obligés de trouver quelque chose pour se défaire de la tension qui les enveloppait, après ce mois loin l'un de l'autre à se demander si tout était terminé sans qu'ils ne se le soient dit clairement. Ca devenait presque dangereux pour eux que d'attendre dans une situation aussi incertaine. Ils se détruisaient et bientôt, ils n'auraient même plus les armes nécessaires pour se reconstruire. Un crissement de pneus et des bruits de klaxons dans la rue firent frémir Rose, qui se fouina encore plus contre Harry, avant de sangloter de plus belle. Elle avait envie de lui hurler qu'elle le détestait, parce qu'il était la seule personne au monde à la rendre aussi rayonnante de joie mais aussi la seule à la mettre dans un état pareil. Elle voulait se détester de l'aimer autant, parce que ça la réduisait à néant, que son c½ur lui faisait mal et qu'elle voulait juste tout oublier, et rentrer dans une de ces photos qui étaient posées sur le plan de travail, là où ils gardaient une trace de leur amour inconditionné et sans limite, où leurs yeux ne se fermaient jamais, où leurs c½urs n'étaient jamais brisés et où le temps était figé. Tout semblait tellement plus simple, sur une photo. On ne pouvait y voir que la vérité. Les mensonges passaient à la trappe, il n'y avait que tout ce qu'il y a de plus vrai. Leurs sourires, leurs yeux qui brillent, leurs visages étincellants, eux deux dans toute leur splendeur. Si seulement la réalité pouvait y ressembler. Peut-être que ce serait monotone après tout. Peut-être qu'aimer ça faisait du mal et que c'était normal, peut-être qu'aimer c'était aussi réparer des plaies béantes même si ça en ouvrait d'autres, peut-être que c'était la vie tout simplement. Mais alors où était le mode d'emploi pour tout rafistoler, une fois que c'était endommagé ? Ce n'était pas fait pour rester comme ça, si ? Non. La réponse était non. Et s'ils devaient prendre trois ans, ils les prendraient, mais ils allaient retrouver ce qu'ils avaient eu il y a de ça six mois, quand tout allait encore bien, quand ce n'était qu'eux deux, à l'abris des regards et des jugements.
Rose finit par se détacher du bouclé et s'essuya le dessous des yeux face au miroir incrusté dans les portes de placard. Elle prit une grande inspiration et releva les yeux vers Harry. Ses orbes étaient rougies par les larmes qu'il avait versées lui aussi et il avait l'air aussi abattu qu'elle. Elle attrapa un torchon propre et le passa doucement sous le robinet d'eau chaude avant de lui appliquer sur le visage avec la plus grande délicatesse. Il se laissa faire en silence, ses mains entourant la taille de la jeune fille, avant de lui retirer des mains pour faire de même, en évitant ses yeux maquillés. Il récupéra leurs verres qu'il n'avait pas eu le temps de laver et les remplit d'eau fraîche qu'il tira du frigo. Harry sourit doucement en voyant Rose grimacer à cause de la fraîcheur trop extrême et la prit par surprise en l'embrassant juste après pour lui « réchauffer les lèvres », avait-il murmuré. La brune s'était contentée d'acquiescer, alors que son c½ur reprenait un rythme insoutenable. Elle jeta un regard par la fenêtre et replongea son regard dans celui du Britannique.
ROSE_ Il y a une forêt autour, c'est ça ?
HARRY_ Oui pourquoi ?
ROSE_ Elle est très fréquentée ou bien on peut aller se balader dedans ?
HARRY_ Il n'y avait jamais personne dedans chaque fois que j'y suis allé, renifla Harry en laissant échapper un petit rire.
ROSE_ Parfait alors, enfile tes chaussures, on va y faire un tour. Je pense qu'on a besoin d'un peu d'air frais, et puis on a encore des choses à se dire, affirma Rose.
En moins de deux, Harry était remonté enfiler des chaussettes et ses chaussures alors que Rose n'avait qu'à zipper ses bottines et à passer son pull vert au dessus de sa tête. Elle sourit doucement en réalisant qu'il s'était imprégné de l'odeur d'Harry même s'il ne l'avait porté qu'une toute petite heure et observa la même réaction chez le bouclé. Elle attrapa son bonnet à pompon et l'enfonça sur son crâne, alors qu'il faisait de même avec un bonnet bleu électrique. Du bleu, encore. « Pour aller avec le pull ». Rose secoua la tête et entremêla ses doigts avec ceux d'Harry avant de le tirer avec elle en bas des escaliers puis vers la porte d'entrée. Elle le regarda verrouiller la serrure et enclencher l'alarme et ils descendirent les quelques marches du perron, main dans la main, avant de faire quelques mètres sur le trottoir pour se poster devant le passage piétons. Le feu était vert et donc rouge pour eux, mais Harry voulut traverser tout de même puisqu'il n'y avait pas de voitures, se faisant largement réprimander par Rose qui avait soudainement perdu toutes couleurs sur son visage. Ils attendirent alors une minute de plus avant d'entrer dans la forêt qui faisait face à la maison que le bouclé avait achetée.
L'odeur de bois humide et de nature s'infiltra rapidement dans leurs narines. Le temps était couvert mais quelques rayons de soleil passaient entre les branches des grands arbres qui étaient alignés de chaque côté de l'allée principale. Effectivement, Harry avait raison, c'était absolument vide de monde. Le vent faisait frémir doucement les rares feuilles des marronniers et des chênes qui avaient survécu à l'hiver. La plupart des arbres étaient nus. Les températures extrêmement basses avaient dépecé ces êtres vivants de leurs vêtements colorés et avaient fait mourir la nature. La rangée de bancs qu'ils pouvaient voir sur leur droite était vide et donnait à la fois un côté paisible et dramatique à la forêt. Les pelouses étaient la seule touche de couleur qui restait, le vert luisant encore des gouttes de la rosée matinale constrastant avec le marron-gris des troncs et des branches. Harry et Rose marchèrent en silence pendant une dizaine de minutes, appréciant le calme que leur offrait la nature alors que le chaos était complet en eux-même. La jeune fille avait eu raison. C'était exactement ce qu'il leur fallait. Un bol d'air frais, pour se défaire de cette impression de suffoquer qui les avait prise tous les deux un peu plus tôt. Ils avaient enfin l'impression de respirer, de vivre, de laisser leurs problèmes s'envoler, de se laver de leurs tracas, et c'était extrêmement revigorant. Arrivés au bout de l'interminable allée principale, le bouclé les fit bifurquer sur la droite. Ils arrivèrent alors dans une sorte de petite clairière et Rose n'attendit pas plus longtemps avant de s'asseoir sur le petit banc qui faisait face à un autre petit chemin, ni plus avant de prendre la parole.
ROSE_ Je me suis pas excusée pour cette nuit, commença-t-elle, ses mains posées de chaque côté de ses genoux sur le rebord du banc, alors qu'elle balançait doucement ses jambes d'avant en arrière, comme les enfants. Je suis désolée que tu m'aies vue comme ça, que tu aies eu à me gérer. Désolée de t'avoir réveillé, aussi.
HARRY_ Tu rigoles ? Je me fiche de ça Rose, je voulais simplement m'assurer que tu allais bien. Ce n'était pas la première fois ?
ROSE_ Non, souffla-t-elle en secouant la tête. Ca m'est arrivé y a deux semaines, à Bordeaux. C'est maman qui s'est occupée de moi.
HARRY_ Le même cauchemar ?, déglutit Harry en acquiesçant.
ROSE_ Le même. Enfin, une répétition du même. Comme si c'était arrivé une deuxième fois, cette nuit.
HARRY_ Et qu'est-ce que c'était ? Tu suppliais Cal, c'était plutôt ... étrange. Et tu t'es levée pour regarder ton téléphone.
ROSE_ J'étais à Paris, je rentrais des cours, et je recevais un appel de Cal, depuis les Etats-Unis. Il- Il m'annonçait que tu t'étais fait rentrer dedans par un camion et- et moi je pouvais rien faire, j'étais à 10h d'avion de toi et puis- et puis je te dis, cette fois, j'avais l'impression que c'était la deuxième fois, et je voulais pas y croire e-, raconta Rose en sanglotant de nouveau.
HARRY_ Shhhhhh. Je suis là Rose, chuchota Harry en l'attirant contre lui. Il ne m'est rien arrivé, tu m'entends ? Je suis en pleine forme et tu vas bien aussi. Je suis désolé que tu aies rêvé d'une chose pareille. Je suis toujours très prudent au volant je te le promets. Calme-toi.
ROSE_ Et si ça arrive vraiment un jour, je fais comment moi ? S'il t'arrive quelque chose et que tu me le caches parce que je suis loin et que je pourrais ne jamais le savoir ?
HARRY_ Hey, Babe, jamais je te cacherais un truc aussi énorme tu m'entends ? Même si je sais que ça te ferait énormément de mal comme ça a pu t'en faire cette nuit, tu serais au courant. Et puis entre nous, je ne pense pas que ça passerait inaperçu au niveau de la presse alors crois-moi, je m'arrangerais que tu l'apprennes autrement que sur les réseaux sociaux. Mais ça n'arrivera pas. Je fais attention à moi.
ROSE_ Bah oui je vois ça, tu traverses quand le bonhomme est rouge !, bougonna Rose en se grattant le nez.
HARRY_ Ca ne se reproduira plus, c'est promis. Je comprends mieux pourquoi tu grognais maintenant. Et toi, je veux que tu me préviennes s'il t'arrive encore de rêver d'un truc pareil, d'accord ? Je ne veux pas que ça se reproduise non plus, insista Harry.
ROSE_ Mais comment est-ce que je peux être certaine que tu vas bien si on est toujours loin l'un de l'autre ?
HARRY_ Je sais que c'est compliqué Rose, mais c'est pour ça qu'on se fait confiance. Pense aux femmes qui laissaient partir leurs maris au front pendant la guerre, elles n'avaient absolument aucun moyen d'avoir des nouvelles, hormis les lettres qui mettaient parfois des semaines à arriver. On vit au 21è siècle ma puce, on est connectés quand même. Et puis, c'est toi qui me proposait une relation libre il y a une heure Bébé.
ROSE_ Argh, je sais, pigna Rose. Mais on est obligés de faire quelque chose Harry et je sais que tu es d'accord avec moi. On fera pas long feu si on ne fait pas en sorte d'être satisfaits l'un et l'autre.
HARRY_ Je ne serai pas satisfait par une relation libre, Rose, je ne sais pas dans quel magazine people tu as lu qu'un truc pareil m'enchanterait, s'exclama-t-il en levant les yeux au ciel.
ROSE_ Tu vois très bien ce que je veux dire. Tu veux que les médias m'oublient, donc si on se voit pas, y a plus de chances pour que ça arrive. Et moi, j'oublie ce que tu as fait parce que tu vas tellement me manquer que je vais réaliser que c'est ridicule que je laisse un truc aussi stupide m'empêcher de t'aimer normalement, expliqua Rose, à présent sûre d'elle.
HARRY_ Pourquoi est-ce que tu veux appeler ça une relation libre ? Ca fait très chaud lapin comme terme, grogna le bouclé. C'est genre, j'ai un plan cul officiel et puis je me permets d'en avoir d'autres quand elle est pas dispo. Or on est pas le plan cul de l'un et de l'autre, et on n'a pas prévu d'aller en trouver d'autres. Ca ne nous correspond pas, je suis désolé.
ROSE_ Comment est-ce que tu peux me faire rire quand on est au milieu d'une conversation aussi sérieuse chaton ?!, rit-elle doucement.
HARRY_ Parce que je suis très drôle. Non mais sérieusement, Rose, on peut pas simplement se dire qu'on se donne de la place, qu'on met un peu d'espace entre nous, même si je sais que je ne tiendrai pas plus d'une journée ?
ROSE_ Déjà, tu as tenu un mois, je te ferai dire. On a commencé y a un mois, on est juste en train de poser des mots sur la situation. Et puis, quand tu dis espace, ça fait break. Genre on casse et on se remet ensemble quand ça va mieux. Or je ne veux pas de ça. Parce que je sais que ce sera toujours toi et que notre date me tient à c½ur, je veux pas qu'on en instaure une autre. Alors relation libre parce que ça reste une relation, elle est juste ... libre ?, argumenta la jeune fille.
HARRY_ Et si on choisissait chacun le terme qui nous convient ?, proposa-t-il. Je choisis « torture ».
ROSE_ T'es franchement pas drôle Harry, tu crois que ça me fait plaisir d'en arriver là ?
HARRY_ J'espère pas tiens. Mais avoue qu'il y a quelque chose qui cloche quand même. On est en train de parler de ça aussi posément, comme si c'était normal. Mais c'est pas normal, Rose, et je vais crever.
ROSE_ Je ne crois pas que « posément » corresponde à ce qu'il s'est passé dans la cuisine tout à l'heure, si ? Et puis, là, on agit simplement comme des adultes, tu en es un maintenant, et tu sais quoi ? Je suis fière de nous. C'est déjà une preuve qu'on sait ce qu'on fait, tu vois ? On serait pas aussi calmes si on savait que ça nous menait à notre perte.
Harry acquiesça doucement et le silence retomba entre eux deux. Leur regard était rivé au sol, sur la terre et les petits gravillons qui entouraient le banc sur lequel ils étaient assis. Une brise légère balayait quelques brindilles et faisait hérisser leurs poils planqués sous les épaisses manches de leurs pulls en tricot. Leurs mains étaient de nouveau l'une dans l'autre et leurs c½urs battaient au même rythme, même si un peu déréglés par la décision qu'ils venaient de prendre. Tout restait encore très flou et ils avaient tout de même du mal à se dire qu'ils venaient délibérément de choisir aussi calmement de mettre de la distance entre eux. Ils n'avaient pas été loin de la syncope l'un et l'autre les 30 jours qui avaient précédé et ils prenaient la décision de recommencer ? Ca paraissait complètement fou. C'était contraire à tout ce qu'ils avaient pu faire auparavant. Rose avait pardonné son infidélité à Harry en moins de trois jours une fois qu'ils s'étaient retrouvés, incapable comme elle était de rester loin de lui. Trois jours. Comment espéraient-ils tenir plus ? Ca allait être un véritable challenge, et si Rose avait presque l'air confiante, ce n'était pas forcément le cas d'Harry, que les fantômes du passé habitaient toujours.
HARRY_ Tu sais, je fais semblant d'aller bien parce que tu as l'air de gérer le truc, mais moi je suis certain que d'ici deux jours je vais m'arracher les cheveux.
ROSE_ Je vais pas bien non plus, je bluffe. Mais c'est pas forcément une mauvaise chose pour toi, tu peux même tirer dessus avec des ciseaux tant que t'y es, ils commencent à être vraiment longs, en profita Rose.
HARRY_ Tu trouves mes cheveux trop longs ? Okay. Et si on faisait un marché ?
ROSE_ Qui a dit que j'avais envie de ça avec toi ?
HARRY_ Je me coupe les cheveux quand on met un terme à la torture, proposa Harry, fier de son coup.
ROSE_ Tu te fous de moi ? C'est quoi tes idées merdiques Harry ?, protesta la jeune fille. ... Okay. Deal. Mais c'est ton problème si on te traite de clochard.
HARRY_ Parfait, comme ça, je suis sûr que ça ne durera pas trop longtemps. Je vais me faire des pouet-pouet tout le temps, je sais que tu détestes ça.
ROSE_ Mon Dieu, c'est pas comme ça que tu me feras venir chez toi, abruti.
HARRY_ Si je peux me permettre, tu étais bien contente d'avoir quelque chose à tirer hier, dans le lit, ajouta le brun avec un sourire en coin.
Rose leva les yeux au ciel avant de se lever du banc, tirant Harry avec elle. Il était déjà 16h, soit 17h en France, et elle savait pertinemment qu'ils prendraient un temps fou à se séparer. Alors elle entraîna son bouclé de petit ami le long du chemin qu'ils avaient emprunté plus tôt, toujours aussi calme. L'allée était encore déserte, à l'exception d'une jeune femme dont la tête était ornée d'une chapeau melon bordeaux assise sur un des bancs, visiblement en train de lire. Elle ne releva même pas la tête lorsqu'ils passèrent devant elle dans un silence de plomb, hormis le bruit de leurs dents qui claquaient. La température avait chuté de quelques degrés et le soleil commençait presque déjà à se coucher. Le vent se levait et s'infiltrait dans les branches nues, fouettant doucement leurs pommettes rougies par le froid. La seule source de chaleur venait de leurs mains entrelacées. Harry avait passé la seconde et Rose était presque obligé de galoper pour marcher aussi vite que lui et ses grandes jambes, si bien qu'il s'arrêta soudainement et lui fit signe de grimper sur son dos. Elle ne se fit pas prier et accrocha ses bras autour de son cou alors qu'il crochetait ses bras derrière ses genoux. Il continua son chemin en essayant de ne pas défaillir quand les lèvres de Rose frôlèrent sa nuque comme une petite plume, ni quand elle glissa ses mains congelées le long de ses clavicules. Qu'est-ce qu'elle espérait ? Qu'il ne réagisse pas ? Qu'il sourie comme si tout allait bien, alors qu'elle allait presque lui dire adieu dans quelques minutes ? Sûrement pas, mais c'est ce qu'il se força à faire, parce qu'il ne voulait pas souffrir encore plus que ce qu'il souffrait déjà. Il attendit sagement que le piéton passe au vert et que toutes les voitures aux alentours soient arrêtées pour traverser, recevant un « Merci » dans le creux de son oreille. Il déposa Rose au sol une fois arrivé devant la porte et attrapa la clé pour l'ouvrir, avant de la refermer derrière eux.
ROSE_ Il est déjà 16h30, je devrais pas tarder à partir à la gare chaton, je monte rassembler mes affaires.
HARRY_ J'ouvre le garage pendant ce temps-là, tu me rejoins dans la voiture ?
ROSE_ Non, je- Harry, je ne pense pas que tu devrais m'emmener, souffla Rose doucement, d'un air désolé. Je vais prendre le bus, il y a un arrêt juste en face.
HARRY_ Bébé tu en as pour plus d'une heure de bus avec un changement, ça ira plus vite en voiture, se défendit-il.
ROSE_ On ne peut pas prendre le risque que quelqu'un nous voie Curly. Pas quand on s'apprête à ne pas se voir pendant un moment justement pour cette raison.
HARRY_ Ca nous fait perdre une heure tous les deux ...
ROSE_ Je sais, murmura Rose.
Elle grimpa les marches deux par deux et fourra tout ce qui lui appartenait dans son sac. Elle en ferma la fermeture éclair et se releva, jetant un dernier coup d'oeil au goût amer tout autour d'elle. Elle aurait bien aimé vivre ici à la longue, avec lui, mais ce n'était pas pour elle, pas pour le moment, en tout cas. De toute façon, ses cours et son appartement l'attendaient à Paris, et elle était si près du but qu'elle ne pouvait tout abandonner. Elle redescendit les escaliers, son sac sur l'épaule, et retrouva Harry appuyé contre le dossier d'un fauteuil, à faire rebondir une balle de tennis qu'il avait dû trouver dans un tiroir à côté. Il releva la tête vers elle et rattrapa la balle pour la lâcher sur les coussins, avant de lui adresser un petit sourire triste. Ils étaient là, l'un en face de l'autre, séparés par un pied à tout casser, à ne pas savoir quoi dire ni quoi faire. Ils avaient toujours eu du mal à se dire au revoir, mais cette fois, c'était différent. Ce n'était pas seulement au revoir, c'était plus que ça. Ils ne savaient pas la prochaine fois qu'ils se parleraient, la prochaine fois qu'ils se verraient sur Skype et encore moins en vrai. Une énorme boule bloquait leur gorge et martyrisait leur estomac, les empêchant de faire quoique ce soit. Ils étaient figés, mais le temps ne l'était pas, pas comme sur les photos. Les aiguilles tournaient et Rose devait filer. Pourquoi était-ce si dur de se séparer ? Pourquoi rendaient-ils ça aussi horrible ? Au moins, ils n'avaient pas à le faire sur le quai de la gare alors que les portes du train se fermaient, cette fois, alors ils auraient dû en profiter.
HARRY_ Combien de temps est-ce que ça va durer ?, osa-t-il demander, le regard rivé au sol.
ROSE_ Je n'en ai aucune idée, haussa-t-elle des épaules. Ce sera à nous d'en décider. On verra bien quand on se sentira prêts.
HARRY_ Et si je suis déjà prêt maintenant ?
ROSE_ Harry, ne rends pas le choses encore plus compliquées, je t'en prie.
HARRY_ Excuse-moi, c'est juste que ... j'ai l'impression de te perdre un peu quand même, et je me sens pas très bien, déglutit le brun en relevant enfin les yeux vers elle pour croiser les siens.
ROSE_ Tu ne me perds pas, je fais toujours partie de toi. Je suis dans ton c½ur, je suis sur ton coude, je suis dans ta tête, je suis sur toi à travers le pull. Je suis partout, même dans cette maison. Je serai là sans être là, et je t'en prie, ne crois pas que je suis en train de t'abandonner, c'est loin d'être le cas. Tu sais que j'en souffre aussi, je fais simplement ce que je pense qui est le mieux pour nous, d'accord ?, souffla Rose en glissant un main dans la vallée de son cou.
HARRY_ Je sais. Je ne m'en prends qu'à moi-même de toute façon, c'est moi qui ai merdé ... Je peux te prendre dans mes bras une dernière fois ?, demanda Harry bêtement avant de la voir se jeter à son cou.
ROSE_ Pourquoi est-ce que tu poses ce genre de questions ? Tu croyais que j'allais partir sans un câlin ? Sans tes lèvres sur les miennes ? Tu ne te débarrasseras pas de moi aussi facilement Harry.
HARRY_ Quand est-ce que je te verrai la prochaine fois, alors ?
ROSE_ J'en ai aucune idée, soupira Rose en se détachant légèrement de lui pour attraper de nouveau son regard.
HARRY_ Est-ce que tu peux venir aux Brits s'il te plaît ? Déjà que tu ne voudras pas qu'on se voie pour la St-Valentin ...
ROSE_ Je serai en vacances, je viendrai, c'est d'accord. Mais je serai très discrète. Tu es au courant que si on me voit, ça rallongera encore plus tout ça, pas vrai ?
HARRY_ Je sais. On sera prudents, c'est promis. Je veux juste te retrouver. Au plus vite. Mettre tout ça derrière nous, affirma Harry en posant son front contre le sien.
ROSE_ Moi aussi. Ca va aller, je te le promets. On va s'en sortir et tout ira mieux. ... Je dois y aller Bébé, il est tard, chuchota Rose en frottant le bout de son nez contre le sien. Je t'aime, ne l'oublie pas.
HARRY_ Je t'aime aussi. Plus que tu ne peux l'imaginer.
Rose sentit son c½ur se serrer en observant une larme s'échapper des paupières de son amoureux. Elle se hissa sur la pointe des pieds pour l'embrasser une dernière fois, en espérant lui communiquer toute sa passion et son amour pour lui. Elle ne voulait pas partir sans établir à nouveau cette connexion particulière qu'ils avaient quand leurs lèvres se rencontraient, quand leurs deux c½urs battaient à l'unisson. Elle voulait quitter cette maison en sachant qu'ils ne faisaient toujours qu'un. Ses larmes se mêlèrent à celle d'Harry alors qu'il la serrait contre lui du plus fort qu'il pouvait sans l'étouffer pour autant. Leurs langues dansèrent une dernière fois, étouffant les gémissements et les sanglots qui menaçaient de s'échapper de leurs bouches. A leur plus grand étonnement, c'est Harry qui se détacha d'elle le premier, la libérant de son étreinte de fer. Il pressa ses paumes contre ses yeux et renifla avant de se diriger vers la porte qu'il déverrouilla. Il savait qu'une fois qu'elle serait dehors, les sanglots qu'il retenait allaient sortir et que ce ne serait pas du joli. Il l'attira une dernière fois dans ses bras en lui imposant de prendre soin d'elle et de lui envoyer un message une fois qu'elle serait arrivée chez elle, pour qu'il ne s'inquiète pas, et ouvrit la porte doucement. Il voyait la poitrine de Rose se soulever à une vitesse hallucinante et il comprit qu'elle était dans le même état que lui. Elle bluffait, elle lui avait dit plus tôt. Harry se pencha vers elle pour lui voler un dernier baiser humide tout en susurrant un dernier « Je t'aime » que la jeune fille accueillit en hochant la tête, incapable de parler. Elle descendit les quelques marches du perron en se mordant la lèvre pour ne pas craquer et se retourna une dernière fois pour le voir. Il avait l'air aussi perdu qu'elle, et elle n'avait qu'une envie, faire demi-tour, se jeter à son cou et retirer tout ce qu'ils avaient pu dire, tout ce qu'ils avaient prévu, parce que c'était inhumain que de se faire autant de mal quand on savait qu'on s'aimait. Pourtant elle continua de marcher et traversa la rue pour aller se poster à l'arrêt de bus. Trois minutes. Elle avait trois minutes pour continuer de regarder Harry qui s'était posté à la fenêtre de la cuisine pour ne pas être trop visible dehors au cas-où. Elle ne le quitta pas des yeux. Il ne la quitta pas des yeux. Ce n'est que lorsqu'elle vit le bus arriver au bout de la rue qu'elle bougea. Elle pointa sa poitrine, forma un petit c½ur avec ses doigts puis le pointa lui, avec un petit sourire qui devait ressembler à une grimace à cause de ses sanglots qu'elle retenait. Il hocha la tête et laissa le rideau se refermer alors que le bus arrivait pour dissimuler Rose. Elle grimpa devant et aposa la Oyster Card qu'Harry lui avait payée l'année précédente sur la borne avant d'aller s'asseoir à l'arrière du véhicule, là où elle pouvait encore apercevoir la maison d'Harry. Puis les portes se refermèrent et le conducteur redémarra, s'éloignant de l'endroit où Rose avait laissé son c½ur pour une durée indéterminée. Et elle n'attendit même pas le premier virage pour exploser en gros sanglots qu'elle étouffait comme elle pouvait dans la manche de son pull vert, qu'elle s'apprêtait à porter tous les jours sans exception pour avoir un bout de lui avec elle.

NIALL_ PUTAIN DE BEQUILLES DE MERDE, ragea le blond.
A ses côtés, Basile, son garde du corps, soupira bruyamment. Niall était susceptible, grognon, râleur, il pétait un câble pour la moindre broutille et s'emballait pour un rien. Son comportement des derniers jours était insupportable et Baz en avait plus que marre de devoir le traîner de droite à gauche alors qu'il grognait sur ces béquilles, pour ne pas changer. Il aimait Niall, ce n'était pas un mensonge, mais il ne le supportait pas en ce moment. Baz était arrivé fin novembre dans la vie du chanteur, il avait été accrédité par Modest! pour s'occuper de sa sécurité et ils avaient rapidement dû apprendre à s'entendre. Cela n'avait pas été bien compliqué quand on savait à quel point Niall était drôle et attachant, néanmoins, Baz avait rapidement été mis au courant du problème de Niall, et ce par les garçons même. Il vivait une séparation difficile, valait mieux éviter de lui parler d'amour et autres. Il avait rapidement deviné également que le mannequin qu'il avait dû gérer pendant un mois était une couverture sur son désespoir et il avait fait de son mieux pour ne pas lui dire que ce n'est pas en mettant du fond de teint dessus qu'on fait passer un bleu. Mais ce n'était pas vraiment ses affaires, cela faisait à peine deux mois qu'ils devaient faire à deux, ce n'était pas son rôle que de lui dire ce qu'il devrait faire.
Alors quand Niall lui avait annoncé qu'il voulait sortir ce soir, Baz n'avait pas vraiment eu le choix, il avait dit bonsoir à sa petite soirée tranquille et avait enfilé ses chaussures ainsi que sa veste. Il avait pris les clés de sa voiture, avait rejoint Niall chez lui et l'avait amené au Café de Paris, une célèbre boîte de nuit londonienne et ils s'étaient garés à plusieurs mètres de l'entrée pour pouvoir rentrer tranquillement. Baz avait à peine eu le temps de prévenir les videurs du bar qu'ils étaient déjà arrivés.
NIALL_ PUTAIN JE M'EMMÊLE LES PINCEAUX !
BAZ_ Tu ferais mieux d'arrêter de hurler si tu veux qu'on te foute la paix, conseilla le garde du coup.
NIALL_ Baz, je t'adore, mais c'est ton job ce soir de veiller à ce que personne vienne me souler. J'ai besoin d'être tout seul.
BAZ_ Tu crois pas que tu aurais été mieux chez toi si tu voulais qu'on te foute la paix ?
NIALL_ Des paparazzis, annonça le blond, avec presque un soupir de soulagement dans la voix.
BAZ_ Merde, tu veux que je veux fasse quelque chose ?
Niall haussa les épaules et continua son chemin vers l'entrée. Avoir les paparazzis collés à ses baskets signifiait qu'il y aurait des photos de lui et il espérait secrètement que Juliette les voit. Il voulait qu'elle les voit, qu'elle pense qu'il allait bien, qu'il sortait parce qu'il était plutôt bien dans sa peau. C'était un mensonge, c'était de la provocation mais il s'en foutait totalement.
Les videurs lui ouvrirent les cordons rouges réservés aux VIP et l'escortèrent jusqu'à un box tranquille dans le carré privé du club. Sans rien demander à personne, il jeta ses béquilles au sol et clopina à cloche pieds pour s'affaler sur la banquette moelleuse recouverte de velours couleur aubergine. Il posa son portable sur la table basse et alluma l'écran d'une pression sur le bouton central. Pas de messages. Niall soupira et le jeta plus loin avant de s'emparer de la carte des boissons.
SERVEUR_ Que puis-je vous servir, Monsieur Horan ?
NIALL_ Une vodka red-bull, demanda-t-il. S'il vous plait, ajouta-t-il tout de même.
Le brun qui lui faisait face hocha la tête et récupéra son plateau qu'il coinça sous son bras. Perdu, Niall se passa une main sur le front et se massa rapidement les tempes avec son pouce et son index avant que Baz ne s'asseye face à lui dans la banquette opposée.
NIALL_ Commande ce que tu veux.
BAZ_ Je suis en service, j'ai pas le droit de boire.
NIALL_ T'es là en tant que chaperon et un verre va pas te tuer.
BAZ_ T'es têtu comme gars, ronchonna Basile, un sourire en coin.
NIALL_ Elle me le disait tout le temps, releva le chanteur.
Baz se rembrunit. Il avait voulu faire un peu d'humour, il s'était raté. Niall attrapa le coussin rouge sur sa gauche et le posa sur son ventre avant de récupérer son téléphone et de lancer l'application Instagram. Barbara venait de poster une selfie et il eut soudainement envie de vomir. Cette fille était censée être sa nouvelle conquête mais il la détestait à un point qu'il n'avait que rarement atteint. Il y avait aussi une selfie de Kendall Jenner et Niall lui adressa un merveilleux majeur droit alors qu'il avait envie de commenter un très poétique « You're not Rose, you cunt » qu'il retint au dernier moment. En faisant défiler les photos il tomba sur un cliché d'un compte qu'il connaissait par c½ur. Juliette. Juliette avait posté une photo, il y a quinze heures. Il s'agissait d'un cliché d'elle au milieu d'une troupe de danseurs dans laquelle il reconnut Danielle mais le garçon qui la tenait par les épaules lui donna une violente envie de tout casser.
C'était qui ce gars avec ses cheveux noirs et bouclés ? Il sortait d'où ? Il voulait quoi ?! C'était quoi cette arnaque ?!
SERVEUR_ Votre vodka red-bull, Monsieur.
NIALL_ Amenez moi des shooters de Adios Motherfucker, je vais en avoir besoin.
SERVEUR_ Combien ?
NIALL_ Commencez déjà par douze, on verra après.
BAZ_ Douze ? Niall, t'es pas sérieux ? s'estomaqua le garde du corps.
NIALL_ Je suis Irlandais, souffla-t-il en descendant son verre de vodka cul sec.
Baz secoua la tête, clairement effaré. Le cocktail que s'apprêtait à ingérer Niall était très fort, il s'agissait d'un mélange de vodka, de rhum, de tequila, de gin et Caraçao bleue, arrosé d'un peu de soda au citron. C'était littéralement LE cocktail à prendre si on voulait être saoul vite et bien. Et il en avait commandé douze shooters. C'était de la pure folie, il risquait le coma éthylique avec une telle dose d'alcool dans le sang, c'était dangereux. Pourtant, il se retrouva impuissant quand les douze shooters apparurent sur la table basse et que Niall en jeta trois au fond de sa gorge, grimaçant de la brûlure de l'alcool.
A quoi bon rester sobre, de toute manière ? A quoi bon essayer de se battre quand visiblement, c'était perdu d'avance ? A quoi bon tout faire pour regagner Juliette si elle ne voulait même pas tenter ? Il l'avait perdue. Il l'avait perdue pour de bon et il ne la récupèrerait jamais. Il l'avait perdue parce qu'il avait voulu se protéger lui-même au lieu de faire passer son couple en premier et il s'en voulait tellement qu'il aurait pu aller s'exiler en Alaska pour ça. La chambre froide du club était moins loin, peut-être qu'ils le laisseraient dormir là-dedans, jusqu'à ce que ses connectiques soient gelés et qu'il crève de froid, sans la chaleur de Juliette pour le réchauffer. Il aurait préféré encore crever plutôt que de passer sa vie sans elle. Il était rien, sans Juliette. Il était pas capable d'aimer quelqu'un d'autre, il était fait pour l'aimer elle, son corps avait été fait pour s'imbriquer avec celui de la ballerine, il n'y avait qu'elle qui comptait ...
Une violente nausée l'abattit alors qu'il repensait au mannequin hongrois entre ses draps. Il avait perdu son temps, il avait voulu trouver quelque chose que seule Juliette pouvait lui donner, il cherchait les petits picotements dans le bout de ses doigts, il cherchait l'impression de chute libre, il voulait retrouver les vertiges mais tout était resté désespérément plat alors qu'elle posait ses mains à des endroits où seules celles de Juliette étaient autorisées.
Niall voulait Juliette. Il ne voulait qu'elle. Il ne voudrait qu'elle, pour le reste de sa vie. C'était la seule, c'était l'unique, c'était la fameuse âme s½ur que tout le monde sur cette foutue Terre recherchait. Sans elle, il était condamné à errer sur cette putain de planète, perdu, sans but précis. C'était Juliette, sa famille, alors quoi ? Il allait rester tout seul jusqu'à la nuit des temps ?
En regardant le fond de son shooter, Niall réfléchit à une ultime solution. Peut-être y avait-il toujours un moyen de retourner auprès de Juliette ? Peut-être trouverait-il une ultime tentative à mettre en ½uvre ? Après tout, Juliette lui avait toujours dit que rien n'était joué d'avance. Et puis elle croyait au karma et toute cette merde, elle était une fervente défenseuse du « Si tu fais les choses bien, tu seras récompensé » ainsi que du « Ça devait être écrit ... », alors Niall pensait que peut-être il y avait encore une chance pour qu'il arrive à la convaincre de revenir chez eux.
Et puis son portable vibra sur la table basse. Empreint d'un espoir tout nouveau, il se surprit à penser qu'il s'agissait d'un signe du destin, que c'était forcément Juliette qui lui envoyait un SMS pour lui dire à quel point il lui manquait et comme elle regrettait ses mots lors de leur séparation à l'aéroport. Elle lui dirait qu'elle était désolée. Elle lui demanderait une nouvelle chance. Elle le supplierait de tout reprendre du début. Elle promettrait qu'elle serait honnête et qu'elle ne ferait plus de conneries. Qu'elle ne serait plus qu'à lui et que Zayn était définitivement une menace éradiquée. Il ne demandait pas qu'elle arrête de le voir, c'était son meilleur ami et le sien aussi par la même occasion. Simplement une promesse qu'il aurait l'entière exclusivité cette fois.
Sur l'écran, le pseudo de Juliette s'affichait, accompagné du logo Twitter. Un petit message court, quelques caractères mais Niall eut envie de vomir, une nouvelle fois.

Les neuf derniers shooters s'envolèrent comme un moustique que l'on chasse.

Un bloc de trois carrés bleus d'explosé. La partie se finit sur ces derniers points marqués et Juliette soupira en voyant qu'elle n'avait plus de vies disponibles pour jouer. Voilà à quoi l'avait menée sa relation avec Niall : à une addiction à Collapse Blast carabinée. La danseuse verrouilla son téléphone avant de le glisser dans son sac à dos en cuir noir et elle ramassa sa veste également en cuir sur le siège à côté d'elle. Sur l'écran face à elle, la référence du vol en provenance d'Hong Kong venait de basculer en « Atterrissage prévu dans 02 minutes » accompagné d'un beau « Terminal E ». Elle replaça son bonnet noir correctement sur ses cheveux et soupira en les sentant arriver au niveau de ses omoplates. Ils avaient repoussés depuis son coup de ciseau spectaculaire et ce n'était pas pour lui déplaire, elle envisageait même de demander à Louise de lui installer des extensions parce qu'elle pensait que cela n'allait pas assez vite. Ses longs cheveux qui caressaient le creux de ses reins lui manquaient, quelque part. Certes, se coiffer le matin était dix fois plus simple au moins, mais elle avait l'impression d'avoir perdu une part d'elle-même et elle regrettait ce choix pris sur un coup de tête. Ses cheveux ne ressemblaient plus à rien, ils encadraient son visage d'une manière étrange et pas vraiment harmonieuse. Elle avait l'impression que rien n'allait dans le sens dont elle le voulait, que des mèches complètes se barraient dans tous les sens et ça l'énervait à un point qu'elle haïssait.
Des papillons dans l'estomac, Juliette rejoignit le terminal E tout en ajustant son pull crème à mailles fines. Elle le lissa rapidement, replaça ses mitaines correctement sur ses doigts et s'assura que ses lacets étaient correctement faits sur ses bottines noires. Tout était niquel. Elle était prête. C'était important pour elle que d'être la plus parfaite possible alors qu'elle s'apprêtait à retrouver les garçons, elle ne voulait pas qu'ils la retrouvent dans le même état qu'ils l'avaient laissée, c'était important pour elle qu'ils voient qu'elle avait réussi à reprendre sa vie en main, qu'elle se battait pour réparer ses erreurs et qu'elle avait l'impression de plutôt bien sortir, ces temps-ci.
Autant ne pas mentir, retrouver les garçons l'avait hantée pendant une semaine depuis qu'ils lui avaient dit qu'ils arriveraient aujourd'hui à Heathrow. L'impatience se mêlait bien souvent à l'appréhension, la rendait un peu fébrile et bien trop anxieuse. Elle espérait simplement qu'ils soient aussi heureux de la revoir qu'elle ne l'était. Parce que plus elle y pensait, plus elle avait hâte. Elle avait hâte de retrouver leurs éclats de rire et leurs blagues vaseuses, elle avait hâte de retrouver l'odeur de renfermé et se sueur sur leurs fringues, elle avait hâte de retrouver les petits jams à trois heures du matin, elle avait hâte d'entendre leurs disputes et la façon qu'ils avaient de se charrier en permanence. Le bruit du sèche-cheveux aussi lui manquait. Elle avait hâte de retrouver les flacons de produits pour les cheveux, les bonnets en mauvais état, les jeans sales et les chaussettes qui traînent partout.
C'est le blond qu'elle remarqua en premier, il faut dire que sa présence était plutôt imposante mais c'est le bouclé qui suivait qui amorça le déclic. Le revoir était décidément tout ce qui lui fallait pour propager une explosion de joie dans son esprit, suivie de près par un immense soulagement que de le récupérer à ses côtés.
La première foulée fut rapide et c'est avec un grand sourire qu'Ashton vit Juliette se précipiter vers lui. Ouvrant ses bras en grand, il réceptionna la ballerine qui lui sauta dessus pour se pendre à sa nuque alors que la valise du batteur restait derrière eux en retrait. Juliette fouina le bout de son nez dans son cou et huma son odeur à pleins poumons, bien trop heureuse de retrouver son meilleur ami après tant de temps passé loin l'un de l'autre. Un certain sentiment de sécurité l'envahit alors qu'il repliait ses bras autour de sa taille pour la porter en l'air, dans un geste taquin. Elle était avec Ashton, rien ne pourrait plus lui arriver, il prendrait soin d'elle et tout irait mieux. Ashton allait poser les derniers pansements. Ashton allait la rassurer et lui montrer qu'elle pouvait reprendre confiance en elle.
Ashton allait l'aider et la protéger.
Rien que pour ça, elle aurait pu en pleurer.
ASHTON_ Tu m'as tellement manquée, sourit-il en lui claquant un baiser dans le cou. Je suis trop content de te revoir en pleine forme !
JULIETTE_ A moi aussi, tu m'as manqué. Et si je suis bien maintenant, c'est grâce à toi. Si tu n'avais pas pris soin de moi, je sais pas où je serais ...
..._ JULIEEEEEEEETTE !
JULIETTE_ MIKE ! hurla-t-elle avant d'aller l'étreindre. Wow, ils sont super tes cheveux, on dirait une-
MICHAEL_ Une mouffette inversée, ouais je sais, explosa-t-il de rire. Dis donc, la teinture que je t'ai faite à super bien tenue !
JULIETTE_ Hmm, bof, environ six semaines. Mais Lou s'en est occupée, j'ai retrouvé ma couleur d'origine, sourit-elle. Mais je compte les reteinter dans pas longtemps, c'était drôlement chouette !
MICHAEL_ Quelle couleur ?
JULIETTE_ Un tie & dye violet !
MICHAEL_ Pas possible ! Je vais me faire des mèches violettes dans les semaines qui arrivent !
JULIETTE_ Ooooooh, s'enthousiasma-t-elle. On devrait le faire ensemble !
..._ Es-tu bien sûre que ça passera pour le ballet ? ricana une voix suave derrière elle.
JULIETTE_ Calum ! Aww, ça me fait plaisir de te voir ! Dis-moi, tu aurais pas fait de la muscu ces derniers mois ?
CALUM_ Ça se voit tant que ça ?
JULIETTE_ T'es un peu plus carré au niveau des épaules, rit-elle.
CALUM_ Ah c'est cool !
Juliette sursauta quand une paire de bras vint s'enrouler autour de sa taille avant qu'une tête ne se pose sur son épaule. Un soupir de soulagement lui arriva aux oreilles, comme un murmure de supplication pour qu'on laisse cette personne en paix, calée sur son épaule. Quand elle comprit que c'était Luke, elle explosa de rire et déposa ses bras par-dessus ceux du guitariste qui bailla et marmonna quelques mots qu'elle ne comprit pas le moins du monde.
LUKE_ Jetlag, grogna-t-il.
CALUM_ On t'a pas vue au Koko ! se plaignit le bassiste.
JULIETTE_ Hmm ... Vous étiez avec Niall et Harry, grimaça-t-elle.
MICHAEL_ Comment ça s'est passé à New-York ? Vous avez recollé les morceaux ?
JULIETTE_ On est pas ensemble, si c'est ce que tu demandes. J'ai essayé de limiter les dégâts mais je suis pas sûre que ça ait marché ...
ASHTON_ BON, changea-t-il de sujet. Et si on rentrait, histoire de poser nos affaires ?
LUKE_ Du moment que je peux m'allonger et dormir, bougonna Luke, toujours collé à Juliette.
JULIETTE_ T'es mignon, toi, rit-elle en lui ébouriffant les cheveux.
LUKE_ Toi aussi, t'es mignonne.
Juliette ne releva pas, elle se contenta de se libérer des bras de Luke et fila pour rejoindre le van qu'elle avait fait attendre à une sortie de l'aéroport. Elle avait insisté pour que leur chauffeur les attende à une sortie plus discrète et autant dire que ç'avait été une bataille sans précédents pour faire comprendre au pauvre homme qu'elle était réellement une personne de confiance, une proche du groupe. Déjà qu'il ne savait même pas les noms des membres du groupe, ç'avait été un vrai calvaire. Les fans avaient malheureusement compris le stratège et une bonne centaine attendait dans le hall qu'elle avait choisi pour faire partir les garçons, Juliette était définitivement piégée. Ashton soupira et posa un bras autour de ses épaules avant de lui murmurer de ne pas écouter les critiques qui pourraient fuser mais de se contenter de sourire. Elle hocha la tête, laissa Ashton la serrer brièvement contre son flanc et suivit les garçons quelques pas derrière eux. C'était pourtant trop tard, les fans l'avaient vue et une partie d'entre elles abandonnèrent l'espoir de voir les garçons pour se ruer sur elle. Juliette tenta de maîtriser la vague mais elle se sentait tellement petite face à des filles qui faisaient une ou deux têtes de plus qu'elle et qui lui hurlaient de prendre une photo avec elle. Elle posa pour quelques selfies, signa une coque de portable, accepta un bracelet arraché d'un poignet en catastrophe et sourit aux quelques mots gentils qu'elle reçut.
Et puis rapidement, ce fut un déluge de questions auxquelles elle ne pouvait/voulait pas répondre, du genre « Est-ce que tu vas te remettre avec Niall ? », « Est-ce que tu peux donner ça à Harry ? », « Comment il est Liam en vrai ? », « Allez, avoue, quelle taille le Horan snake ? ». Ce n'était rien encore, quand les fans qui en avaient fini avec les Australiens s'amassèrent dans le groupe et que rapidement, une salve de « Connasse », et autres « Salope, va, t'as brisé le c½ur de Niall ! » ne viennent la gifler en pleine figure. Les larmes commencèrent à lui monter aux yeux et elle était persuadée que cela se voyait, à en voir certaines filles essayer de la défendre par des secs « C'est pas tes affaires, vieille truie ! ». Plus elle essayait de s'en sortir, plus la foule se contractait autour d'elle, la piégeant et la faisant suffoquer. Partout autour d'elle, Juliette ne voyait que des paires d'yeux et des lentilles d'appareils photo qui la mitraillaient, qui la jugeaient, qui imprimaient ces images d'elle en pleine détresse. Elle allait être la risée des fans, tout le monde allait se moquer d'elle et la traiter de faible. La masse de personnes ne faisait que grossir et bientôt, elle s'en trouva essoufflée et tremblante, alors qu'elle sentait des gens l'agripper, la tirer d'un sens et de l'autre, lui tirer les cheveux, la griffer, la pousser.
Alerte rouge.
Crise.
Juliette était en train de faire une superbe crise d'ochlophobie, un trouble qui l'avait affectée depuis le début de son adolescence et qui n'avait fait que s'intensifier quand Sacha avait fait de sa vie un enfer. Elle sentait que cela montait et bientôt, si on ne lui laissait pas assez d'espace, elle avait littéralement suffoquer, devenir rouge tomate, se mettre à pleurer et éventuellement en tomber dans les pommes suite à une anxiété trop élevée.
Juliette tenta de jouer des coudes mais rien n'y faisait. Elle était comme une abeille dans un verre de sirop : collée.
Et au moment où elle sentit la crise toucher à son paroxysme, elle sentit également une paire de bras s'entourer autour de sa taille, alors que sa vision devenait progressivement blanche et que des vertiges l'assaillaient.
Elle se sentit être traînée au travers de la foule mais ne comprit pas tout ce qu'il se passait autour d'elle avant de finalement sentir l'air frais lui frapper la peau ainsi qu'une série de jurons et de « PUTAIN ELLE EST EN TRAIN DE PARTIR LES GARS, PUTAIN ON FAIT QUOI ELLE EST EN TRAIN DE TOMBER DANS LES POMMES, PUTAIN, PUTAIN DE PUTAIN DE MERDE DE CHIOTTES ». Incapable de reprendre le contrôle, elle se sentit être portée dans des bras forts et musclés avant d'être posée assez délicatement –la notion restant à revoir- sur une banquette. Une tape sur la joue, deux, trois, douze et finalement, une giclée d'eau froide furent nécessaires pour qu'elle revienne complètement à elle et ce sont quatre garçons totalement paniqués qui lui firent face.
Les bras d'Ashton la serrèrent immédiatement contre son torse développé alors que Michael soupirait de soulagement, lâchant un « Putain de merde » qui fendit l'air comme un couteau.
LUKE_ Tu devrais boire. Désolé de t'avoir arrosée, t'es toute mouillée maintenant, souffla-t-il en lui tendant sa bouteille d'une main secouée violemment de tremblements.
CALUM_ Je t'ai pas fait mal avec mes baffes, là ? Dieu, me fais pas refaire ça, j'avais jamais levé la main sur une fille à part ma s½ur, frissonna le bassiste.
JULIETTE_ Ça va, ça va, soupira-t-elle, un peu effrayée par tout ce qui venait de se passer.
ASHTON_ Putain, je t'ai sentie partir quand on t'a récupérée, c'est Michael qui t'a portée jusqu'à la voiture parce que j'savais pas quoi faire, tremblota le batteur.
JULIETTE_ Merci Mike ...
MICHAEL_ PLUS JAMAIS TU NOUS FAIS CA, PUTAIN ! hurla le chanteur, au bord de la crise de nerfs alors qu'il s'arrachait les cheveux. J'AI CRU QUE J'ALLAIS DEVOIR ANNONCER A TON FRERE QUE T'ETAIS MORTE, MERDE, PUTAIN, BORDEL !
Juliette prit quelques secondes pour se remettre de ses émotions et laissa Ashton examiner ses pupilles, sa température et si ses mains tremblaient ou non. Il lui posa un milliard de questions au moins pour s'assurer qu'il n'y avait aucune séquelle au niveau de sa tête et une fois qu'ils furent sûrs que tout allait bien, prirent la route pour l'appartement qu'ils occuperaient, le temps de ce voyage britannique. Le silence dans l'habitacle était pesant et Juliette pria très fort pour que le trajet soit le plus court possible. Il ne fut pas très long, finalement et une fois la porte du loft ouverte, Ashton lui ordonna de s'asseoir sur le canapé. Il sortit du frigo qu'ils avaient fait remplir, un pot de Nutella et un sachet de pain de mie, en tartina une dose généreuse et lui fourra lui-même dans la bouche, accompagné d'un grand verre de jus de fruits qu'il la força à avaler. Quand toutes ces choses furent faites, il la traîna dans sa chambre, la laissa s'asseoir sur son lit et commença à défaire sa valise. Il en était à la moitié quand la sonnette du loft résonna dans tout l'appartement. Calum hurla qu'il allait ouvrir et bientôt, des pas précipités se firent entendre avant de s'arrêter devant la porte pour l'ouvrir d'un coup sec et violent.
Sacha.
Juliette en retint son souffle, lançant un regard paniqué au bouclé dont le tee-shirt qu'il s'apprêtait à ranger en tomba au sol. Sans rien dire, le brun se pointa devant Juliette, se laissa glisser sur ses genoux et la serra très fort contre lui. Ashton laissa quelques secondes passer mais bientôt, la pièce fut rythmée par le bruit des sanglots de la brune et il décida qu'il valait mieux les laisser seuls pour gérer tout cela. Michael lui fit signe rapidement qu'il avait prévenu Sacha par SMS de l'incident et Ashton hocha la tête, comme pour lui dire que c'était une bonne idée.
Parce que même avec toute la bonne volonté du monde, Ashton ne connaîtrait jamais Juliette aussi bien que son jumeau et s'il y avait bien une personne qui savait comment calmer la danseuse après une crise pareille, c'était bien celui qui partageait la plupart de son ADN avec elle.
Sacha aurait toujours la solution.

Harry redoutait l'arrivée de sa maman et de sa s½ur plus que de raison. Cela faisait maintenant une grosse semaine que Rose était repartie et il n'avait encore rien dit à personne, hormis Liam qui s'était inquiété de savoir comment s'était terminée sa soirée d'anniversaire. Malgré ce qui s'était passé après, le bouclé avait remercié son ami des milliers de fois pour ce qu'il avait fait pour lui. Il lui devait beaucoup, et il n'était pas près d'oublier tout ce que Liam avait pu faire pour lui. Les autres étaient occupés chacun de leur côté et Harry n'avait aucune envie d'engager une conversation pour finir par leur annoncer qu'il ne savait pas vraiment si Rose était sa copine ou une correspondante. Comme promis, elle l'avait averti de son arrivée. Depuis ? Rien. Huit jours sans rien. Rien, parce qu'il ne considérait pas que les c½urs qu'ils s'échangeaient avant de dormir était quelque chose. Ce qu'il voulait c'était parler avec elle, voir son visage sur l'écran de son téléphone, avoir de vraies conversations, et surtout la tenir dans ses bras et pouvoir prendre soin d'elle. Est-ce qu'elle était dans le même état que lui ? Est-ce qu'elle aussi était en train de péter un câble alors que ça faisait seulement quelques jours et qu'ils ne s'étaient pas donné de délais ? Il n'osait pas lui demander, il n'avait pas le droit, de toutes façons. Le droit. Comme s'il allait respecter ça pendant six mois. Il espérait bien que ça durerait pas six mois. Comme s'il avait envie de laisser six mois de sa vie passer sans voir Rose. Quelle bonne blague. Pourquoi est-ce qu'il avait accepté une chose pareille ? Et puis elle, elle croyait vraiment qu'elle allait s'en sortir ? Ils étaient aussi faibles l'un que l'autre quand il en venait à l'autre moitié de leur c½ur, ils n'allaient très certainement pas faire long feu. Et ce n'était pas dans les bras de quelqu'un d'autre qu'ils allaient aller se consoler, encore moins après l'expérience de Niall avec Barbara. C'étaient leurs mamans qui allaient sécher leurs larmes de crocodiles et c'était une belle de preuve de leur niveau de maturité. Ce n'était pas une décision d'adultes qu'ils avaient prise, c'était une décision de collégien, et Harry n'avait même pas la force de faire machine arrière.
Anne et Gemma arrivèrent sur le coup de midi. Tout comme Rose, elles n'avaient encore jamais vu la nouvelle maison du bouclé, et c'était là qu'elles étaient venues le rejoindre pour déjeuner. Harry attendait nerveusement derrière la porte, prêt à leur ouvrir à n'importe quelle seconde, mais anxieux quand à leur réaction à propos de plusieurs choses. Il ne les avait pas revues depuis sa fuite du premier de l'an, il ne s'était pas encore fait remonter les bretelles par sa maman ni fait frapper par sa s½ur, il les avait eues au téléphone pour son anniversaire mais seulement avant l'arrivée de Rose et il ne leur avait pas annoncé ce qui avait suivi. Ils allaient avoir énormément de choses à se raconter autour de la table et cela le faisait doucement paniquer. Et visiblement, la nervosité était apparente sur son visage.
ANNE_ Mon lapinnnnn !, s'écria sa mère en se jetant à son cou pour le serrer dans ses bras avant de se détacher de lui pour lui pincer les joues. Bonne Année, espèce de chenapan, et puis, Joyeux Anniversaire. Je n'arrive pas à croire que mon petit bébé ait 20 ans. Où est passée l'époque où tu mangeais tes saucisses dans tes petites assiettes à l'effigie des 101 Dalmatiens ?
HARRY_ L'été dernier sur le tournage de Story Of My Life, sourit-il faiblement en refermant la porte derrière sa s½ur avant qu'elle ne l'enlace elle aussi.
GEMMA_ Joyeuse Saint-Valentin, Joyeuses Pâques, Joyeux Noël, ricana sa s½ur. Comment tu vas, espèce d'abruti ? Je crois que tu as des tonnes de choses à nous dire, depuis la dernière fois qu'on t'a dit bonjour.
HARRY_ Je sors les lasagnes du four et je vous dis tout ça pendant qu'on mange. Je vous fais visiter après, d'accord ?
Les deux femmes acquiescèrent tout en se déshabillant et en observant déjà la pièce dans laquelle elles se trouvaient. Les photos et cadres accrochés aux murs les firent sourire, ainsi que l'atmoshpère qui y régnait. On sentait que le bouclé l'avait conçue avec tout l'amour qu'il avait en lui et elles étaient fières de lui, malgré les souvenirs cuisants de ce qu'il avait fait un petit mois auparavant. La table était déjà mise et Harry revint rapidement avec un plat de tomates/mozarella qu'il avait passé un peu de temps à préparer un peu plus tôt. Anne ne pût qu'admirer ses talents de cuisinier et se sentir honorée d'être la maman de ce jeune homme qui savait tout des bonnes manières, malgré la célébrité qu'il avait depuis un bout de temps maintenant. Son fils n'avait pas changé d'un poil depuis ce virement radical dans sa vie et elle en était incroyablement fière. Il était toujours ce garçon farceur et charmeur qu'elle avait élevé et c'était toujours un plaisir pour elle que de passer un peu de temps avec lui comme s'il était encore un résident d'Holmes Chapel, comme si le 23 juillet 2010 n'était jamais arrivé.
ANNE_ C'est super bon mon poussin, merci beaucoup, le félicita-t-elle entre deux bouchées. Alors comment s'est passé ton mois à Los Angeles ? Tu aurais pu prévenir quand même, tu n'es franchement pas malin.
HARRY_ C'était horrible. Mais je l'ai mérité.
GEMMA_ C'est bien que tu en sois conscient au moins. Tu as fait quelque chose pour arranger ça ? Tu n'as répondu à aucun de mes appels ou messages après celui du 4 janvier.
HARRY_ J'ai pris un avion pour Paris pour m'expliquer. J'ai tout dit à Rose même si elle ne voulait pas m'écouter au départ et elle m'a viré de son appartement. Je suis reparti en lui laissant mon journal pour qu'elle puisse tout comprendre et on ne s'est pas parlé de tout le mois.
ANNE_ Ton journal ? Genre le journal en cuir que tu ne lâches pas ? Genre ... ce journal là, au bout de la table ?
HARRY_ Celui-là, oui. Et puis Liam m'a aidé à la faire venir pour mon anniversaire. On a passé la soirée puis le lendemain ensemble, continua Harry comme si c'était tout à fait normal.
GEMMA_ QUOI ROSE EST VENUE ET TU NE ME LE DIS MÊME PAS ?! Harold, tu es un petit frère indigne, j'y crois pas, ça fait un mois que je flippe comme une folle pour vous deux !, s'exclama la blonde en s'étouffant à moitié.
HARRY_ Je suis pas réellement heureux du dénouement, alors je le crie pas sur les toits, non ...
ANNE_ Comment ça ? Harry vous êtes toujours ensemble hein ? Tu vas pas laisser Rose t'échapper, elle est géniale, tu ne peux pas la laisser partir, tu m'entends ?, le pressa sa maman avec des gros yeux.
HARRY_ Je sais plus vraiment ce qu'on est, maman. Rose a voulu appeler ça une relation libre, mais c'est stupide, parce qu'aucun de nous n'ira voir ailleurs. Je crois qu'on essaie juste de se donner un peu d'espace pour mieux se retrouver quand on pensera que c'est le bon moment. Mais ça fait à peine une semaine et je crève déjà de ne pas lui parler, se lamenta le bouclé.
GEMMA_ Oh merde ... Elle a décidé ça à cause de ton mensonge ?
HARRY_ Elle pense que ça pourrait aider à ce qu'on l'oublie. Mais j'en ai même plus envie. Je veux juste qu'elle soit avec moi et si les autres sont pas contents qu'ils aillent se faire foutre profondément et-
ANNE_ Harry, ton langage !
HARRY_ Ca va maman, j'aurais pu être encore plus vulgaire, ces gens insultent Rose, tu veux leur envoyer un bouquet de fleurs pour les féliciter ?, ironisa Harry. Sérieusement, je veux bien être respectueux, mais y a des moments où j'aimerais bien qu'on me renvoie l'ascenseur.
ANNE_ C'est vrai qu'on se demande où est-ce que certaines ont été éduquées mais bon. Tu crois que ça va mener à quelque chose ?, demanda timidement sa maman.
Harry releva la tête vers sa maman et la fixa quelques secondes avant d'hausser les épaules et de se lever pour aller chercher le plat principal. Anne soupira doucement en échangeant un regard avec sa fille. Elles avaient bien vu la tristesse dans les pupilles du brun et elles avaient à la fois envie de le réprimander parce qu'il s'était lui-même mis dans un tel pétrin, et de le consoler parce qu'elles comprenaient ce qu'il pouvait ressentir. Au fil des mois, elles avaient vu son amour pour Rose prendre des proportions considérables, et le voir se la faire arracher par son travail était révoltant. Il n'aurait jamais rencontré Rose s'il n'avait pas fait partie de ce groupe, d'accord, mais c'était tout de même crisant que des filles qui ne les connaissaient ni d'Eve ni d'Adam se permettent de les détruire d'une telle façon. Ils étaient peut-être jeunes mais ils gouttaient à l'amour, au vrai, et Anne ne supportait pas de voir son fils s'en faire éloigner. Il revint avec le plat chaud qu'il posa sur un torchon et servit les deux femmes avant de déposer sa part de lasagnes dans sa propre assiette. Gemma raconta une bêtise pour le faire rire et se maudit quand elle vit à peine ses fossettes se creuser. Harry avait le moral à zéro et c'était toujours poignant de le voir dans un tel état.
GEMMA_ Pourquoi est-ce que tu n'as pas essayé de lui proposer autre chose ? Tu aurais pu refuser, non ? C'est votre relation à tous les deux, tenta Gemma en soufflant sur sa fourchette.
HARRY_ Je lui ai promis de tout accepter si elle restait avec moi samedi soir ...
GEMMA_ Oh non mais Harry, tu abuses, tu as fait du chantage pour une partie de jambes en l'air ? T'as quel âge putain, c'est ta relation toute entière qui était en jeu !
HARRY_ Mon Dieu, mais c'était pas pour ça Gem', c'était bien plus que ça. Si elle n'était pas restée, elle aurait pris cette décision et en plus de ça je n'aurais même pas passé le lendemain avec elle, rouspéta Harry, les joues rouges. Et puis de toutes manières, après ce que je lui avais fait, tu crois que j'étais en position de dire non et de lui imposer autre chose ? Non. Elle a peut-être miné mon moral mais je m'estime heureux qu'elle m'ait pas brisé le c½ur. Elle aurait pu partir, et ça aurait été pire que tout.
ANNE_ Harry n'a pas tort, Gem', c'est vrai, après tout, n'importe qui serait parti, constata sa maman.
HARRY_ Merci maman, tu aides beaucoup, grogna le bouclé.
GEMMA_ Ca va Harold, fais pas comme si tu ne savais pas que tu avais tout foutu en l'air avec tes conneries. Tu étais bien parti pourtant, c'est adorable ce que tu as voulu faire, mais pourquoi faire ça dans son dos ? Surtout avec une pouf pareille. Et puis la lettre, alors là, c'était le pompon. Tu t'es cru dans un film ? Non parce que dans les films ça se passe bien après, mais là on est dans la vraie vie, lui rappela sa grande s½ur en levant les yeux au ciel.
HARRY_ Et sinon, vous vous en sortez avec la décoration de la maison maman ?
Un léger sourire se peignit sur les lèvres d'Anne alors que Gemma affichait un visage outré. Harry venait gentiment de lui faire comprendre qu'il en avait assez de parler de ses problèmes et qu'il était conscient de ses erreurs et la mère de famille était presque fière de le voir tenir tête à sa s½ur. Ses deux enfants s'étaient toujours très bien entendus, mais Gemma avait toujours eu ce côté un peu cheftaine et première de la classe auquel Harry avait du mal à répondre. Il avait laissé sa s½ur le rabaisser à plusieurs reprises quand il était plus jeune, parce qu'il était persuadé qu'elle avait raison, mais maintenant qu'il avait grandi, il avait compris qu'en fait, ils avaient chacun leur propre opinion et qu'il n'y avait rien de mal. Il n'était pas obligé de l'écouter, pas obligé d'acquiescer, pas obligé de faire ce qu'elle lui demandait. Il pouvait se gérer seul, prendre ses propres décisions, et il venait de lui faire comprendre assez sèchement. Du coup, Anne sauta gentiment sur l'occasion et se mit à lui parler de la maison et de son travail, puis de celui de Robin, avant de forcer Gemma à parler du sien et de son nouvel appartement à Londres. Elles avaient essayé de mentionner le prénom de Rose le moins possible, même lorsqu'Harry leur avait fait visiter la maison. Anne enchaîna alors les « Lovely » pleins de sous-entendus chaque fois qu'elle voyait un détail évidemment apposé pour la Française et son fils se contentait de sourire doucement, à la fois fier de son travail et triste de savoir qu'ils n'en profiteraient pas tous les deux avant un bout de temps.

Harry verrouilla son 4x4 et suivit sa maman et sa grande s½ur à l'intérieur du restaurant, son iPhone à la main. Le serveur leur indiqua le numéro de la table qui avait déjà été réservée et ils se frayèrent un chemin parmi les allées pour rejoindre Lou, déjà attablée avec sa fille. Lux n'attendit même pas qu'Harry ait fini d'embrasser sa maman pour se jeter sur lui, ses petites mains s'accrochant aux pans de son par-dessus pour essayer de grimper dans ses bras. Le bouclé rit doucement et se baissa pour l'attraper et la caler sur sa hanche avant de s'asseoir avec le bambin sur les genoux, sous les yeux admiratifs et brillants des deux mères de famille. Pourquoi est-ce que les femmes étaient toujours aussi émotives quand un homme avait un petit enfant dans les bras ? Cette question le démangeait depuis plusieurs années.
LUX_ Harryyyyyyy !
HARRY_ Heyyy Luxy, ça fait un moment que je t'avais pas vue toi, s'écria-t-il en la chatouillant doucement, la faisant rire aux éclats.
LUX_ 'L'est où tata Rose ?
HARRY_ Oh. Euh. Tata Rose est à Paris ma puce, elle est chez elle parce qu'elle va à l'école en ce moment.
LUX_ Appelle, lui dit-elle en essayant de tirer le iPhone de sa main.
HARRY_ Non Lux, elle est en train de travailler je te dis, on ne peut pas la déranger. Et puis je ne peux pas l'appeler, de toute façon, déglutit Harry en essayant d'avoir l'air autoritaire alors que ses émotions reprenaient le dessus.
LUX_ Appelle, pleurnicha Lux en se débattant pour attraper le téléphone qui glissait dans ses petites mains potelées.
LOU_ Lux, laisse tonton Harry tranquille et viens t'asseoir à côté de maman. Tu as quelque chose à leur montrer non ? Qu'est-ce que tu as appris à chanter ?, souffla la blonde en tirant la loupiote dans ses bras pour libérer le bouclé. Tu dis à Anne et Gemma ?
LUX_ L'a'phabet !
ANNE_ Ohhhh, tu as appris l'alphabet pitchoune ? Montre-moi comment tu chantes, sourit-elle.
Lux rit doucement et se cacha derrière ses petites mains quand elle vit le regard des quatre adultes sur elle. Gemma avait sorti son téléphone pour l'enregistrer et ça lui faisait peur. Ses oreilles prirent une teinte rosée et elle commença à réciter son alphabet toujours cachée derrière ses doigts, effrayée de voir la réaction des grands. La maman des Styles souriait presque plus que Lou et Harry observait la petite avec des yeux attendris. Il avait vu Lux grandir au fil des deux dernières années, l'avait tenue dans ses bras quand elle n'était âgée que de quelques jours et la voir ici, deux ans et demi après, debout sur ses deux pieds, à parler et à chantonner l'alphabet, le rendait quelque peu émotif et nostalgique. Il avait une affection particulière pour elle depuis le début, c'était sa petite protégée et la voir grandir le rendait aussi heureux que ça ne l'effrayait. Bientôt elle irait à la crèche puis à l'école à la rentrée prochaine et cela le faisait paniquer comme si elle avait été son propre enfant. C'était ridicule, certes, mais c'était comme ça qu'il le ressentait. C'était un petit bout de chou qu'il avait regardé évoluer, passer chaque étape importante de ses deux premières années et il était attaché à elle, très attaché à elle. Encore plus parce qu'elle était très proche de Rose, presque autant voire plus que de lui, et que ça le rendait tout chose chaque fois qu'ils s'occupaient d'elle tous les deux. Il aurait tout donné pour qu'elle soit là aujourd'hui pour applaudir les exploits de Lux, elle aussi.
LOU_ Bon, toi, je crois que tu as des trucs à me dire, soupira la coiffeuse à l'adresse d'Harry une fois que leurs commandes furent prises et que Lux dessinait sur les sets de table. Ça veut dire quoi « Je ne peux pas l'appeler ? ». Aux dernières nouvelles, vous alliez passer Noël ensemble chez toi.
HARRY_ Long story short, j'ai fait une grosse bêtise et ça fait une semaine qu'on est en « relation libre » pour une durée indéterminée. On est censés ne se parler que rarement, ne pas se voir et moi éventuellement je suis censé voir d'autres personnes pour confirmer la rumeur que je ne suis plus avec Rose. Ce que je ne ferai pas évidemment, affirma-t-il en buvant une gorgée d'eau.
LOU_ Mais vous ne tiendrez pas deux semaines, vous êtes gogoles mes petits lapins !
GEMMA_ Merci Lou, on est d'accord.
HARRY_ Et bah si on tient pas, on arrêtera de faire semblant et on sera de nouveau ensemble. Je le sais que je tiendrai pas, je tiens déjà plus donc ...
LOU_ Aie aie aie, ça me rappelle Tom et moi au départ. Heureusement qu'on avait enfin trouvé la force en nous de se poser. Bon et toi Gem', tu en es où avec Ash ? J'ai cru comprendre qu'il t'avait aidé à emménager !
GEMMA_ Tu as le droit de boucher tes oreilles, lança-t-elle à son petit frère qui semblait exaspéré. Oui, il m'a aidée à emménager, puis ils sont repartis à L.A. et ils sont revenus la semaine dernière, alors je passe un peu de temps avec lui. Je ne sais pas si c'est sérieux ou pas, mais il y a tout de même un petit quelque chose.
ANNE_ « Un petit quelque chose » ? Gemma, il t'a demandé de venir aux Brits avec toi !, s'exclama Anne le plus bas possible pour ne pas attirer le regard des autres clients.
HARRY_ Quoi ?!
GEMMA_ C'est vrai.
HARRY_ Argh, vous faites exprès pour que je vous croise ? Oh et puis je m'en fiche, Rose sera là aussi, marmonna le bouclé en attrapant ses cheveux pour les attacher sur le haut de son crâne.
ANNE_ Mais c'est super qu'elle vienne. Par contre Louise, je t'en prie fait quelque chose à ses cheveux, ça devient ridicule.
LOU_ J'ai prévu de tous les remettre à neuf pour les Brits justement, mais si tu veux que je passe chez toi avant Haz, y a pas de-
HARRY_ Pas touche à mes cheveux. Personne. J'ai fait un marché avec Rose alors personne n'y touche.
LOU_ Seigneur Dieu, n'en dis pas plus merci, il y a des petites oreilles qui traînent. Tu sais quoi, je te trouverai des extensions ultra solides si ça l'amuse mais là, non, je suis d'accord avec ta maman, ça commence à être ridicule. L'autre jour Lux regardait Mulan et elle a cru que tu étais rentré dans l'écran, ricana Louise en se décalant légèrement de la table pour laisser le serveur déposer son plat devant elle.
HARRY_ Mais pourquoi est-ce que vous pensez tous à ça ? C'est vous les obsédés en fait, ça n'a rien à voir, grogna le brun en dépliant sa serviette. C'est un marché qui nous concerne tous les deux, mais t'inquiète pas, je pense que tu pourras rapidement passer un coup de ciseaux. Je l'espère du moins.
LUX_ Mamaaaaan, piailla la petite blonde en tapant le bras de la coiffeuse pour attirer son attention. Maman, 'ai faaaaaim.
LOU_ Je sais mon ange, regarde le monsieur est en train de t'apporter ton assiette. Voilà. Hop, on remonte les manches, imposa Lou en s'exécutant, la serviette autour du cou, et tu peux y aller.
Harry, Gemma, Anne et Lou regardèrent tous Lux se jeter sur son assiette de frites comme si elle n'avait pas mangé depuis quinze jours. Elle mâchouillait ses bâtonnets de pomme de terre comme un petit castor et se léchait les doigts à chaque fois, décidée à ne pas en abandonner une seule miette. Après quelques secondes de contemplation, les adultes se concentrèrent sur leurs propres plats tout en continuant d'échanger. Étant le seul garçon à table, Harry se sentit un peu exclu quand la coiffeuse et maquilleuse commença à aborder le sujet du livre qu'elle allait sortir deux petits mois plus tard alors il fut presque content de voir la petite Lux débarquer à côté de lui, avec les mains et la bouche encore toutes grasses mais un grand sourire sur les lèvres. Il sourit en retour et s'occupa le plus silencieusement d'elle, attrapant la serviette autour de son cou pour la tremper légèrement dans son verre d'eau et nettoyer les doigts et le visage du bambin. Elle se laissa faire un gazouillant doucement et resta plantée là alors qu'il recommençait à manger. Il la regarda avec un air amusé et finit par comprendre la combine quand elle colla ses deux mains ensemble et lui chuchota « Téléphoneeee » avec des yeux aguicheurs. Lux avait toujours su comment demander les choses à Harry, elle savait comment le faire fondre et lui faire oublier son autorité. Il déverrouilla son iPhone personnel en soupirant, baissa complètement le son et lui tendit en lui ordonnant de ne pas le remettre pour ne pas déranger autour d'elle. Elle acquiesça et retourna s'asseoir sur la banquette à côté de sa maman, qui n'avait absolument rien vu de tout ce qu'il s'était passée, trop occupée à parler de photoshoot avec Gemma. Finalement, la conversation dérapa à nouveau sur quelque chose de mixte et Harry put enfin la réintégrer pour parler des textes qu'il avait pu écrire aux États-Unis pendant tout le mois de janvier. Et pendant qu'ils discutaient et que le serveur débarrassait leurs assiettes, Lux continuait de jouer avec le téléphone et à se prendre en photo ni vu ni connu, jusqu'à ce que Gemma la voie.
GEMMA_ Louise, ta fille a deux ans et demi et sait déjà prendre des selfies, gloussa-t-elle.
LOU_ Et envoyer des messages, continua-t-elle en se lamentant. Lux à qui est ce que tu envoies des photos de toi ma chérie. A papa ?
LUX_ Oui, c'est le c½ur rouge, répondit la petite en envoyant un nouvel emoji, puis un autre, puis encore un autre.
HARRY_ LE C¼UR ROUGE ?!, s'écria Harry comme s'il venait soudainement de se réveiller avec un saut d'eau sur la tête. Oh mon Dieu, Lux, rends-moi mon téléph-
LUX_ Roooooooooose !, s'exclama la blondinette en brandissant le smartphone. Rega'de c'est Rose, l'est là, l'est avec papa, elle a 'épondu ! C'était Rose, pas papa !, s'extasiait-t-elle avant de se voir arracher le téléphone des mains par sa mère qui le tendit à Harry avec un regard désolé, se mettant alors à pleurer. Mamaaaaan ! Téléphone ! Rooooose !
LOU_ Non c'est fini, tu as fait une grosse bêtise Lux, je ne suis pas contente. Harry t'a prêté son téléphone pour que tu joues et tu viens de lui attirer des ennuis, lui expliqua Lou avec un ton strict.
ANNE_ C'est réparable Harry ?, s'inquiéta sa maman en le voyant se tirer les cheveux devant l'écran.
HARRY_ Maintenant qu'elle a vu que c'était Lux oui, mais ça fait une demi-heure qu'elle lui envoie des emojis et évidemment elle ne sait pas lire donc elle n'a pas vu les messages de Rose, elle a juste continué à lui envoyer des bonhommes, des chaussures, des sushis, du chocolat, des soleils, toute la bibliothèque emoji. Elle a cru que j'étais bourré, putain, s'exaspéra le bouclé.
GEMMA_ Et que tu allais sûrement te retrouver avec une autre fille un peu plus tard, acquiesça sa s½ur en grimaçant. Explique-lui, elle va comprendre. Et puis, j'allais poster une photo sur Instagram, elle verra bien que tu dis la vérité.
LOU_ Je suis vraiment désolée Harry, j'ai pas surveillé ce qu'elle faisait, se confondît-elle en excuses.
HARRY_ Non c'est moi, je ne savais pas qu'elle savait faire tout ça avec un téléphone, je ne lui aurais pas prêté autrement, ou alors j'aurais mis le mode avion. Je saurai pour la prochaine fois. Ça va aller, c'est pas grave. Je devrais m'estimer heureux, j'ai reçu une photo d'elle au moins, sourit-il tristement avant de commencer à tapoter un message d'explications.
Le serveur vint prendre les commandes des desserts et Harry choisit le premier sur la liste pour ne pas perdre de temps, concentré sur son message. Le silence était complet autour de la table, mis à part le chagrin de la petite Lux, comme si les trois femmes avaient senti que c'était le moment de grâce du repas et qu'il ne fallait pas le gâcher. Le message partit au moment même où la crème brûlée d'Harry arrivait et il le relit rapidement avant de verrouiller son écran en soupirant.
De toute façon, j'avais l'intention de te dire que tu me manquais.
Je t'aime, Harry. Xxx
PS : Joli selfie *-*
Et tu me manques, toi aussi.
Je t'aime encore plus fort.
PS : Joli palmier sur le haut de ta tête. (Remercie Gemma et capte l'ironie.)

JULIETTE_ Oh mon Dieu, je suis confuse, désolée, pardon, s'emporta-t-elle en de nombreuses excuses.
..._ C'est rien, c'est rien, souffla une voix suave, amusée. Oh, Juliette !
JULIETTE_ Elliott ?!
Soudainement soulagée qu'il ne s'agisse que de lui, elle explosa de rire avec son camarade mais rougit rapidement en voyant que son pull blanc était désormais orné d'une grosse tâche de chocolat au niveau du bas de la laine. Qu'est-ce qu'elle pouvait être maladroite, bon sang ! Et il fallait qu'elle renverse son chocolat sur Elliott, par-dessus le marché ! Si elle voulait qu'il retire sa proposition de danser avec elle, elle n'aurait pas pu faire mieux. Rapidement, les rires firent place à une gêne immense, que le jeune perçut immédiatement.
ELLIOTT_ Je faisais pas attention, souffla-t-il. Excuse-moi pour ton chocolat, tu m'en veux pas trop ?
JULIETTE_ C'est moi, je t'ai tout tâché, je courais partout, je suis pas bien maligne, rougit-elle.
ELLIOTT_ Tu as l'air frigorifiée, mon Dieu, je t'ai privée de ta boisson chaude, hmm, il y a un distributeur au premier étage, je peux peut-être te repayer quelque chose ? Ça vaudra pas ton Starbucks, s'excusa-t-il en se penchant pour ramasser le gobelet en carton. Mais euh ... De toute façon, la serveuse s'était trompée dans ton prénom, s'amusa-t-il en lui pointant le « Juliet » qui ornait le papier.
JULIETTE_ C'est comme ça tout le temps, les gens n'arrivent pas à capter que ça s'écrit comme ça parce que je suis Française ...
ELLIOTT_ Moi je le sais, rit-il avec un petit clin d'½il. Allez, viens, je t'accompagne t'acheter un truc à boire, t'as l'air de mourir de froid !
Un peu gênée, Juliette obéit et suivit Elliott dans les couloirs. Il avait l'air de savoir où il devait aller, comme s'il connaissait les couloirs par c½ur. Rapidement, Juliette sut que c'était parce qu'il avait passé une année complète à la Royal Ballet School, comme elle aurait dû le faire si elle n'était pas tombée malade. Avec un petit pincement au c½ur, elle se rendit compte qu'elle aurait dû être comme Elliott, elle aurait dû maîtriser le plan du bâtiment aussi parfaitement que lui, connaître chaque nom de salle et son emplacement, connaître chaque professeur et l'intégralité de sa promo. Elle avait l'impression la plupart du temps d'être un élément rajouté, un cheveu posé sur la soupe, quelque chose dont la présence n'aurait pas dû exister ici. Ce genre de sentiments revenait souvent en ce moment, en particulier ici, à la Royal Ballet School.
ELLIOTT_ Je peux te proposer un chocolat mousseux, bon ils disent « viennois » mais littéralement, ça fait que de la mousse sur le dessus ou un chocolat tout court. Tu préfères quoi ?
JULIETTE_ Le chocolat tout court, mentit-elle, pas vraiment apte à lui demander celui qui coûtait plus cher.
ELLIOTT_ Va pour le mousseux !
JULIETTE_ Mais, je-
ELLIOTT_ Hey ... A d'autres, s'amusa-t-il alors qu'il faisait glisser les pièces dans la machine.
Avec un petit coup d'½il taquin en biais, Elliott appuya sur la touche pour ajouter du sucre, jusqu'à être au maximum et valida la commande. Le gobelet en plastique tomba dans la fente et se remplit rapidement du breuvage chocolaté. Une fois la petite sonnerie indiquant que la boisson était prête retentit, Elliott se pencha et récupéra le verre qu'il lui tendit, un grand sourire aux lèvres.
Avoir Elliott à ses côtés était comme avoir son propre rayon de soleil. Pas une fois en vingt-quatre heures de temps elle ne l'avait vu sans son sourire et même dans ses SMS, les smileys étaient présents partout. Elle avait l'impression que ce garçon était une boule de joie permanente et c'était franchement reposant que de le laisser lui transmettre sa bonne humeur.
ELLIOTT_ Et si on discutait pendant le quart d'heure qu'il nous reste ? Histoire de faire connaissance, sourit-il alors qu'ils avaient rejoint le vestiaire dans lequel Juliette posa son sac dans son casier pour en sortir ses chaussures.
JULIETTE_ Pose-moi des questions, demande-moi ce que tu veux savoir ! répondit-elle joyeusement.
ELLIOTT_ Ok, faisons ça, je te pose une question et tu m'en poses une en retour. Comme des enfants de maternelle !
JULIETTE_ Comme des enfants de maternelle, rit-elle en hochant la tête.
ELLIOTT_ Ok, alors euuuuh ... Oh, je sais, quel est ton nom de famille ?
JULIETTE_ Garnier, comme-
ELLIOTT_ L'opéra à Paris ?! s'estomaqua-t-il. Mais euh, tu fais partie de la famille, non ?!
JULIETTE_ Une question à la fois ! ricana-t-elle. Et c'est mon tour en plus ! D'où viens-tu, Elliott ?
ELLIOTT_ De Birmingham, sourit-il. Alors ? Tu fais partie de la famille de l'opéra Garnier ?!
JULIETTE_ Aww, non, malheureusement, s'amusa-t-elle. Mais j'y allais très souvent avec ma meilleure amie, quand j'allais la voir à Paris ! Est-ce que tu as des frères et s½urs ?
ELLIOTT_ Une petite s½ur, oui ! Elle s'appelle Mia, sourit-il, visiblement très fier de sa petite s½ur. Et toi ?
JULIETTE_ Un jumeau, Sacha, il vit avec moi parce qu'il étudie au conservatoire de Londres !
ELLIOTT_ Wow, tous des artistes dans votre famille ?
JULIETTE_ Juste nous deux, mais on a étendu à plein de domaine, rit-elle. Je prends beaucoup de photos et je griffonne. Sacha dessine très bien et il fait aussi la cuisine.
Elliott continua son interrogatoire aussi longtemps que possible avant qu'ils ne soient forcés à rejoindre la salle de danse. Ses chaussures à talons au pied et sa bouteille d'eau posée au sol dans un coin de la pièce, Juliette tenta de faire abstraction des épaules carrées d'Elliott et de sa façon de marcher qui frôlait la grâce d'un ange. Autant ne pas mentir, elle était troublée, parce qu'Elliott était définitivement mignon et que sa façon de s'intéresser à elle le rendait adorable. Il semblait vraiment heureux d'apprendre tous ces petits détails sur elle, d'apprendre à la connaître qu'elle avait l'impression d'être quelqu'un d'extraordinaire. Ses yeux brun clair étincelaient quand il découvrait une nouvelle petite chose intéressante sur la jeune femme et son sourire n'allait qu'en s'agrandissant. C'était merveilleux que de se sentir pour une fois le centre d'une attention positive et Juliette aimait ce sentiment agréable.
Ils dansèrent toute la séance ensemble. La salsa était leur cours de la journée et dire qu'ils avaient éclipsé les autres seraient un euphémisme. Comme s'ils étaient les seuls dans la salle, ils avaient une présence et une agilité qui dépassaient toute épreuve. Régulièrement, Elliott dut rattraper Juliette avant qu'elle ne s'écrase au sol, explosant de rire d'une telle manière qu'on avait l'impression que c'était le seul bruit rythmant la pièce. Ses yeux se plissaient et ses joues se creusaient d'une ride adorable alors que ses éclats de rire s'échappaient de sa bouche que Juliette se surprit à regarder trop souvent pour que cela soit normal.
Il y avait aussi entre eux une alchimie artistique qui dépassait l'entendement, ils savaient toujours quel mouvement arrivait, ils anticipaient les pas et dégageaient une sorte d'aura fascinante qui en bluffa leur professeur plus d'une fois. Si leur couple de danseurs était déjà très prometteur, leur complicité n'échappa à personne alors qu'ils discutaient en permanence et se souriaient comme des imbéciles heureux. Peut-être aussi que leur façon de ne pas vraiment se détacher l'un de l'autre attisait la curiosité, quelques murmures concernant leur improbable rapprochement. Ils ne les avaient jamais vu ensemble auparavant et les voilà maintenant comme les meilleurs amis de la Terre, tout cela les troublait tous.
Le milieu de la danse était un cercle assez fermé, encore plus quand ça en était au monde encore universitaire. Les bruits de couloir se répandaient vite. Ajoutez à cela le fait que Juliette était désormais une personnalité connue et voilà que la Royal Ballet School allait bon train sur le nouveau couple qui pourrait être en train de se former. En à peine une journée, Juliette avait vu le quota de ses « amies » se multiplier par cinq au moins alors qu'Elliott subissait le même traitement. Mais comme ils ne s'étaient littéralement pas quittés, ils avaient fait front commun, expliquant leur amitié toute fraîche, datant d'une répétition en dehors de l'école. On déformait leurs mots, on revenait, on partait, mais très vite, l'exaspération chez chacun des deux danseurs se fit sentir et c'est ainsi qu'Elliott poussa une gueulante assez sèche et décida qu'il valait mieux prévenir les professeurs et leur dire qu'ils rentraient chez eux. Il n'y avait qu'une heure de cours restante, vu le remue-ménage qu'ils avaient créé, on les renvoya chez eux sans trop plus de cérémonie.
Le voyage jusqu'à l'appartement de Juliette fut silencieux. Elliott n'avait pas de voiture, il expliqua rapidement qu'il n'avait pas encore assez économisé mais que son job de barman était tellement médiocre qu'il envisageait la prostitution. Juliette éclata de rire et rapidement, ils ne surent plus quoi se dire, un peu trop remués par le tapage qu'ils avaient engendré, pour tellement peu ... Juliette frissonna à de nombreuses reprises avant de se mettre à claquer des dents. Sans vraiment s'y attendre, Elliott ouvrit son blouson, retira son pull –toujours tâché- et lui ordonna de l'enfiler. Incapable de refuser une telle offre alors qu'elle congelait sur place, elle le remercia une centaine de fois et passa le vêtement avant de renfiler sa parka.
Londres était si calme aujourd'hui. Les voitures ne klaxonnaient pas autant que d'habitude, il n'y avait pas beaucoup de monde dans les rues. Il faut dire que le froid polaire y était pour beaucoup, il n'encourait pas vraiment les Londoniens à sortir se balader ou faire des courses. Le ciel était tout blanc, les nuages cachaient entièrement le soleil et donnaient une atmosphère nostalgique à la ville.
Juliette se remémora la première fois qu'elle avait vraiment découvert la ville, alors que Niall la traînait partout. Ce Niall-là lui manquait atrocement, celui qui n'était pas encore son petit-ami mais dont elle était déjà amoureuse, celui qui aimait la faire sourire et qui la surnommait Soleil, celui qui riait pour un rien et qui la trouvait la plus belle du monde. Ce Niall-là lui manquait, à tel point qu'elle sentit son c½ur se serrer, comme s'il cherchait la partie appartenant au blond et qui ne faisait plus partie de son être, aujourd'hui.
ELLIOTT_ Ça va ?
JULIETTE_ Ouais, ouais, c'est juste que ... C'est compliqué, grimaça-t-elle.
ELLIOTT_ C'est à cause de ton ex, pas vrai ?
JULIETTE_ Comment tu le sais ?
ELLIOTT_ Je suis pas stupide, Juliette, sourit-il doucement. Je lis les journaux, tu sais, je sais qui il est et je sais que ça s'est mal fini. ... Excuse-moi. J'aurais pas dû te rappeler tout ça, désolé.
JULIETTE_ Non, c'est rien ... C'était de ma faute, de toute façon.
ELLIOTT_ Ce n'est jamais vraiment de la faute que d'une personne, Juliette, la rassura-t-il.
JULIETTE_ On est arrivés, souffla-t-elle en désignant son immeuble du doigt. Merci de m'avoir raccompagnée.
ELLIOTT_ De rien, Juliette. Passe une bonne soirée, on se voit demain à l'école !
Juliette lui fit un signe de la main alors qu'elle passait la porte. Une fois sûr qu'elle était rentrée chez elle, Elliott fit demi-tour pour rejoindre sa maison et Juliette grimpa les marches, toujours engourdie par le froid piquant. Elle déverrouilla la porte d'un coup de clé, prit une grosse inspiration alors qu'elle tentait vainement de chasser Niall de ses pensées et accrocha sa parka à la patère, sur le mur.
C'est à ce moment-là qu'elle se rendit compte qu'elle avait toujours le pull d'Elliott et qu'il ne lui avait pas réclamé. Elle jeta un coup d'½il rapidement dans la rue mais le jeune homme avait déjà disparu. Alors elle attrapa son portable et tapa un rapide SMS au danseur pour le prévenir qu'elle avait oublié de lui rendre son pull mais qu'elle le laverait ce soir et lui rendrait demain matin, promis. Et puis la réponse ne mit pas longtemps à arriver.

Les deux Britanniques saluèrent les infirmières qu'ils croisèrent sur leur chemin et s'arrêtèrent devant la porte de la chambre n°247. Louis toqua doucement et attendit un signe de la part de sa maman pour rentrer. Il appuya sur la poignée et entra dans la pièce, lumineuse et agréable. Daisy et Phoebe avaient décidé de la redécorer avec des dessins et des guirlandes parce qu'elles n'aimaient pas le papier peint et qu'elles voulaient que leur maman soit dans une atmosphère parfaite pour s'occuper des bébés. Dan, le fiancé de Johannah, était assis à son chevet, en train de finir les restes de son plateau repas qu'elle avait encore une fois refusé de terminer, parce que c'était répugnant. A la place, elle mangeait les lasagnes que le jeune papa avait faites réchauffer. Il s'était fait avoir au change, mais il ne s'en plaignait pas. Jay lui avait offert deux jolis nouveaux-nés et il était tellement heureux et fier qu'il en pleurait environ toutes les heures. Si Louis n'était pas stupide, alors le prochain round allait venir très bientôt.
JOHANNAH_ Bonjour mon poussin, tu vas bien ?, demanda-t-elle en lui ébouriffant les cheveux alors qu'il déposait un baiser sur sa joue.
LOUIS_ Ce serait plutôt à nous de te poser la question maman, rit-il doucement tout en serrant la main de son futur beau-père. Tu as mieux dormi cette nuit ?
JOHANNAH_ Super bien même. C'est tout de même reposant de pouvoir dormir en sachant que tu ne seras pas réveillée à deux heures du matin pour une pause tété. Je prends toute l'avance que je peux de sommeil pour les prochains mois à venir.
ELEANOR_ Je suis certaine que Dan se fera un plaisir de t'aider, même s'il n'a pas encore vraiment l'air de savoir ce qu'il lui arrive, sourit la jeune fille en s'asseyant au bout du lit, dos à son amoureux.
DAN_ J'ai pu tenir Ernest dans mes bras tout à l'heure, souffla le père de famille. Il est tellement petit, tellement fragile ... Je ne réalise pas encore que ça y est, ils sont là, continua Dan, sa voix se brisant à la fin.
LOUIS_ Et voilààà, le breakdown de l'heure 13 est là. Qui a planqué des oignons dans ta chambre maman ?
DAN_ J'aimerais bien t'y voir, toi, attends un peu que ce soit ton tour, tu seras pas mieux que moi.
JOHANNAH_ Et ce sera sûrement une des seules fois où je le verrai pleurer depuis qu'il a passé ses 10 ans. Arrête de te cacher petit chat, je sais que tu pleures en cachette dans ton oreiller quand ça va pas, le taquina Jay, alors qu'une infirmière venait chercher le plateau repas et qu'une seconde rentrait à sa suite.
INFIRMIERE_ La nurse a fini de s'occuper d'Ernest et de Doris, vous pouvez aller les voir, si vous voulez.
DAN_ Super, merci beaucoup, répondit Dan, prêt à craquer de nouveau.
JOHANNAH_ Vous pouvez commencer à y aller le temps que je me prépare les enfants. Elle vous connaît, ça ne posera pas de problèmes.
Louis et Eleanor acquiescèrent et sortirent de la chambre, excités. Ils longèrent le couloir principal et bifurquèrent un peu plus loin dans une petite allée qui comportait une grande pièce exposée par une baie vitrée. Dedans, une petite dizaine de boîtes rectangulaires en plexiglas, stérilisées, dans lesquelles étaient allongés des nourrissons. Dans deux d'entre elles, côte à côte, Doris et Ernest, les petits derniers de la famille. Louis toqua doucement à la vitre pour faire signe de leur présence et la nurse releva la tête de son planning, un sourire s'étalant sur ses lèvres. C'était un de ces sourires communicatifs qui vous infusaient une petite dose de bonheur même si vous étiez dans une passe difficile. Le genre de sourires dont les parents qui venaient ici avaient besoin. Elle se dirigea vers la porte et l'ouvrit, laissant les deux jeunes entrer et leur faisant enfiler une blouse bleue immédiatement, ainsi que des chaussons à leurs pieds, avant de leur faire se laver les mains au liquide antiseptique au moins trois fois. Elle s'appelait Nessie et elle avait sûrement juste une vingtaine d'années. On leur avait dit qu'elle n'était qu'une stagiaire en formation, mais elle était passionnée par ce qu'elle faisait, ça avait frappé Louis dès la première fois qu'il l'avait vue. Elle était passionnée, mais aussi très émue chaque fois qu'elle le voyait arriver. Il n'avait pas encore réussi à comprendre pourquoi, alors qu'Eleanor en était persuadée : elle était tout simplement émerveillée de voir que malgré les millions d'euros sur son compte en banque et les destinations de rêve qu'il pourrait découvrir pendant ses vacances, il était dans sa ville natale à rendre visite à ses nouveaux petits frères et s½urs tous les jours comme un grand frère normal l'aurait fait. Louis lui apparaissait comme un garçon simple, contrairement à ce que les médias voulaient montrer de lui, et elle aurait été ravie de filmer chacune de ses venues pour pouvoir prouver au monde entier qui il était réellement.
Nessie laissa les deux Britanniques s'installer entre les couveuses des jumeaux. Leur prénom et nom avaient été imprimé et scotché à l'extérieur du verre, mais Louis n'avait même pas besoin de ça pour savoir qui était qui. Doris ressemblait comme deux gouttes d'eau à chacune de ses petites s½urs lorsqu'elles étaient nées, alors qu'Ernest était d'après ce qu'il avait entendu dire un portrait craché de Dan au même âge. En tout cas, le petit garçon n'avait pas les traits que les cinq Tomlinson avaient, alors il n'y avait pas de quoi se tromper. Louis glissa sa main par la petite fenêtre pour attraper celle de la petite fille qui était réveillée. Nessie l'informa qu'elle venait de les changer et de leur donner à manger, et que c'était pour ça qu'ils étaient très calmes, parce qu'ils avaient hurlé à la mort une heure avant.
ELEANOR_ Elle t'observe, elle est fascinée, c'est vraiment trop mignon, souffla-t-elle, penchée au-dessus de la couveuse.
LOUIS_ Elle doit se demander qui est le méchant monsieur avec la barbe surtout, oui.
NESSIE_ Vous allez pouvoir les prendre dans vos bras tous les deux, s'exclama la nurse une fois que Johannah et Dan furent entrés dans la pièce et équipés également.
DAN_ Vraiment ? Doris aussi ? Vous disiez ce matin qu'elle était trop fragile ...
NESSIE_ Elle est aussi en forme que son frère maintenant. Qui veut prendre Ernest ?, demanda-t-elle en débranchant les deux-trois fils du corps du nourrisson avant de le prendre dans ses bras.
JOHANNAH_ Vas-y Louis, depuis le temps que tu attends !
LOUIS_ Quoi ? Non, maman, c'est ton fils prends-le toi, tu ne l'as pas beaucoup avec toi je-, protesta-t-il.
JOHANNAH_ Je l'ai eu dans mes bras ce matin, toi tu viens les voir depuis trois jours, tu y as le droit, alors profite, insista sa maman avec un grand sourire.
Louis se leva, légèrement tremblant, et laissa Nessie déposer le nouveau-né dans ses bras. Il ouvrit ses yeux aussi ronds que des billes en réalisant qu'il avait l'impression de ne rien avoir dans les bras tellement il était léger, et pinça ses lèvres, presque ému aux larmes. Ernest ne dormait pas non plus. Il agitait doucement ses mains dans le vide et fixait ses grands yeux bleus sur lui. Louis n'osait pas bouger. Il observait le bébé dans ses bras sans cligner des yeux, impressionné par sa taille et son poids plume, et complètement retourné de réaliser qu'après tant d'années à bassiner sa maman pour avoir un petit frère, il l'avait, et il était là dans le creux de ses bras. A cet instant, la vie lui semblait absolument magique. Il leva son regard une fraction de seconde pour le poser sur sa maman et son fiancé Dan qui avait Doris dans les bras, et les reposa sur Ernest. Ce nourrisson qui gigotait contre lui était le fruit de leur amour et c'était tellement beau qu'il en aurait bien pleuré une rivière complète. Ce n'est pas comme s'il venait seulement de comprendre comment on confectionnait un enfant, c'était juste qu'il avait l'impression de ne réellement le comprendre qu'aujourd'hui, parce qu'il était plus âgé, plus mature, et qu'il avait une relation sérieuse avec sa copine. Louis bougea doucement son bras gauche pour le lever à hauteur du visage du petit garçon. Il caressa sa joue du dos de son doigt et frissonna en voyant que le bout de son index faisait la taille de sa pommette. Il était vraiment minuscule, à en faire peur. Il sentait le regard de sa copine posé sur lui et quand il releva la tête, il s'aperçut qu'elle était allée fouiller dans sa poche pour en tirer son téléphone et qu'elle le prenait en photo, les yeux humides.
LOUIS_ Hey Ernie, souffla-t-il doucement alors que le bébé avait attrapé son doigt entre ses petites mains. Je suis ton grand frère, Louis. Ton seul grand frère. Tous les autres visages que tu vas voir, ce sera des filles. Elles ont beaucoup de cheveux, elles mettent du noir sur leurs yeux et elles prennent toute l'eau chaude à la douche. Elles sont gentilles quand même, je te rassure. Mais avec moi, tu pourras parler de football. Tu verras, le foot, c'est chouette. Et puis on fera plein de bêtises tous les deux, tu verras.
DAN_ Ne corromps pas mon fils, Louis, plaisanta Dan.
JOHANNAH_ Tu veux prendre Doris, Eleanor ? Je pense que je vais me mettre à pleurer si je vous vois tous les deux avec un bébé dans les bras mais ça me tente bien quand même.
Eleanor acqiesça, incapable de parler et se laissa faire quand la mère de son copain lui déposa la petite fille dans les bras. Elle gigota un moment et la Britannique crut qu'elle allait se mettre à pleurer, mais elle resta calme, bercée par les petits rebonds que la jeune fille faisait. Jay leur ordonna de se resserrer un peu et prit plusieurs photos avec le iPhone de Louis qu'elle avait recupéré dans les mains d'Eleanor « pour envoyer aux autres ». Louis sourit doucement. Il était certain qu'Harry allait être fou en posant ses yeux sur un tel cliché, tout autant que Rose. Ils étaient faits pareil quand il en venait aux bébés, c'était désespérant et adorable à la fois. Il pouvait déjà imaginer ce qu'il allait écrire, même s'il ne savait pas ce qu'il était advenu d'eux depuis sa dernière conversation avec son meilleur ami. Tant pis, au pire, une photo de lui et de sa copine avec les jumeaux n'allait pas les tuer s'ils ne s'étaient pas parlés depuis un moment. C'était une photo. Juste une photo. Qui allait les tuer.
ELEANOR_ Elle est tellement petite et toute légère, je n'arrive pas à le croire, c'est fascinant, chuchota-t-elle, des étoiles dans les yeux.
LOUIS_ Ils sont minuscules. Et se dire que nous aussi on a été comme ça ... La vie est bien faite, pour certaines choses. Oh oh, je crois qu'il va se mettre à pleurer, grimaça le brun en sautillant un petit peu pour essayer de calmer Ernest qui commençait à pleurer doucement. J'ai rien fait Ernie, t'es pas très cool avec moi, c'est parce que j'ai dit que t'étais rikiki ? Faut voir la réalité en face tu sais.
NESSIE_ Vous n'avez rien fait de mal, il tire simplement la sonnette d'alarme, je pense qu'il est très fatigué, on va les laisser se reposer, affirma la nurse en reprenant le bébé dans ses bras pour le reposer dans la couveuse et le rebrancher, avant de faire de même avec Doris.
JOHANNAH_ Est-ce qu'on pourra les reprendre un peu plus tard ? Est-ce que je peux appeler mes filles ?
NESSIE_ Oui mais elles viendront deux par deux ici, parce qu'on ne peut pas être de trop dans cette pièce, question de sécurité. Mais bien sûr, avec plaisir. A tout à l'heure. Et à bientôt tous les deux, sourit-elle à l'adresse de Louis et Eleanor.
Ils lui rendirent son sourire et quittèrent la pièce, encore tout retournés par la rencontre qu'ils venaient de faire. Les voir et les tenir dans leurs bras, ce n'était clairement pas la même expérience. Maintenant qu'il avait tenu son petit frère entre ses mains et qu'ils s'étaient rendus compte de son poids plume et de sa taille aussi microscopique, il ressentait encore plus l'envie et le besoin de prendre soin de lui, de veiller à ce qu'il aille toujours bien. Il était grand maintenant, en âge d'avoir ses propres enfants, et il était prêt à donner tout ce qu'il avait pour que ce petit garçon grandisse avec un modèle des plus exemplaires. Il avait son papa, évidemment, mais un grand frère joue une place importante également. Parce que même si Louis ne vivait plus chez lui, il restait le premier enfant, celui qui avait tout testé avant, et même ses s½urs qui ne le voyaient que rarement le prenaient comme exemple.
Louis et Eleanor quittèrent l'hôpital main dans la main comme ils y étaient arrivés, mais cette fois, le sourire sur leurs lèvres était différent. Ils avaient passé deux heures absolument parfaites et ils étaient incapables de poser des mots dessus. Plus renversant encore, Louis venait littéralement d'oublier complètement qui il était devenu. Pendant deux heures, il était simplement Louis Tomlinson, le fils de Johannah, l'étudiant à Doncaster, le grand frère de ces deux petits bébés, le copain d'Eleanor. Pas de One Direction, pas de musique, pas de fans, pas de paparazzis, rien. Et honnêtement, il avait beau adorer son métier, ce retour dans le passé lui avait fait le plus grand bien.
Ixwillxlearn, Posté le mercredi 08 octobre 2014 15:15
Ben noooon ! Ils n'ont qu'à se remettre ensemble ... "sifflote" ^^